Le Paradis caché : Le livre de Luca Di Fulvio

Ce livre est paru en août 2023, soit quelques mois après le décès de Luca Di Fulvio, donc c'était son dernier roman. Quel dommage que la disparition de cet incroyable auteur. J'ai lu tous ses livres et à chaque fois c'était une belle découverte. Il nous transporte à travers les siècles et cette fois, nous nous retrouvons en Italie au XVII° siècle dans le monastère de Santa Ulpizia, dans la région de San Michele dans les Alpes Italiennes. C'est un roman à la fois historique mais aussi une histoire d'amour. Je ne remettrai pas plus de renseignements, le résumé se suffit à lui-même pour nous donner envie de plonger dans ce livre. Entre rebondissements, émotions, suspense, romance, sorcellerie, tout cela fait de ce roman une intrique captivante, riche en détails et avec une authenticité historique réelle. Luca Di Fulvio avait une manière très réaliste d'analyser les évènements, mais il le faisait avec brio et d'une façon magistrale. Je ne peux que conseiller cette lecture et évidemment conseiller tous les autres livres de cet auteur.

Quatrième roman que je découvre par l'entremise du #grandprixdeslecteurspocket2025. Merci donc aux éditions Pocket pour cet envoi. Ce long roman nous raconte avant tout une histoire d'amour, mais il parle aussi de justice, de tolérance et d'égalité. En effet, dans ce village montagnard des Alpes italiennes, le pouvoir de l'Eglise régit la vie des habitants. L'Inquisition bat son plein, dictant sa loi aux pauvres pécheurs qui doivent aveuglément obéir à ses préceptes bâtis sur l'ignorance, la peur et la culpabilisation à tout va. Toutefois, deux personnalités ecclésiastiques se distinguent par leur attitude contraire: frère Thevet, prieur du couvent de Santa Ulpizia, et l'abbesse du monastère de la Santissima Assunta Maria de Camporosso. Tous deux vont contribuer de leur mieux à l'éducation de deux enfants qui leur ont été confiés et qui sont dotés d'une intelligence exceptionnelle: Daniele, fils d'un prêtre défroqué qui l'abandonne au couvent, et Susanna, fille d'une prostituée qui meurt à sa naissance sous les yeux du frère Thevet. Les deux enfants sont comme liés par le destin dès leur plus jeune âge. Après une séparation de plusieurs années lors de leur enfance - Daniele étant resté au couvent pendant que Susanna était confiée au monastère - les deux jeunes gens se retrouvent et développent l'un pour l'autre un amour indéfectible. Mais Daniele est une âme tourmentée et influençable, qui croit que l'amour est un fléau, alors que Susanna n'y voit que la perspective d'un bonheur inaltérable. Cette vision de l'amour comme une faiblesse de la chair est entretenue auprès de Daniele par l'un des deux super méchants du récit, j'ai nommé l'Inquisiteur Constantin Tron, qui ferait tout pour causer la perte de Susanna, parce qu'il ressent pour elle une attirance qui le déstabilise. Il est secondé par son fidèle et sournois assistant Paolo Tahler, qui lui, est jaloux à mort de Daniele. Après avoir discrédité Susanna au point de la faire expulser du monastère, l'Inquisiteur poursuit son objectif de destruction en l'accusant de sorcellerie et de meurtre. Daniele vole à son secours en lui proposant son aide lors de son procès: il sera son avocat, soit "l'avocat du diable"... Je n'en écris pas plus sur l'intrigue, foisonnante, structurée en allers-retours temporels entre l'enfance et l'adolescence de Daniele et Susanna, et le procès qui les réunit. Le personnage de Susanna m'a particulièrement intéressé: elle est décrite comme une âme pure incarnée dans un corps magnifique, dotée d'une intelligence hors-norme qui lui donne une soif de connaissance étanchée grâce à la connivence d'un prieur et d'une abbesse particulièrement modernes et éclairés: en effet, à l'époque, les filles n'accèdent normalement pas au savoir: elles restent ignorantes afin de faire des épouses malléables et obéissantes. De plus, Susanna possède une force de caractère qui lui permet, face à l'adversité, de rebondir et de mener à bien ce qu'elle pense être juste. C'est ainsi qu'après avoir été chassée du monastère, et avec l'aide du frère Thevet, elle réussit à survivre et même à apprendre à lire et à écrire, en cachette, aux femmes volontaires du village. Ce petit côté féministe m'a bien plu. Les autres personnages du roman ne sont pas en reste. Toutefois, j'ai beaucoup moins apprécié les aspects beaucoup trop manichéens de leur personnalité, surtout concernant les "méchants", vraiment trop méchants: pas de subtilité à ce niveau. J'ai aussi été gênée par les longueurs qui parsèment ce roman, notamment pendant les débats lors du procès; en plus, ils m'ont paru peu intéressants au niveau de l'argumentaire. Je me suis souvent ennuyée à ces moments du récit. C'est pourquoi ce n'est pas un coup de cœur pour moi, même si j'ai trouvé de nombreux atouts à cette lecture.

Le Paradis caché est le second roman de Luca Di Fulvio que je lis (après Les Enfants de Venise il y a quelques années) et j'en ai l'image d'un auteur de livres romanesques, avec des personnages emblématiques, un contexte historique fort et des intrigues très fouillées. On est clairement dans cette ambiance ici : les méchants sont très méchants (aussi bien dans leur apparence que dans leurs actions), les gentils sont animés de sentiments nobles et forts mais subissent bien des épreuves et on a le dépaysement d'un petit coin de la campagne italienne au XVIIe siècle. L'écriture est très belle également, l'auteur a un vrai talent de conteur. Je dois pourtant avouer que la lecture des cent premières pages de ce roman n'a pas été facile : on est plongé directement dans l'intrigue (qui au passage enchaîne allers et retours à deux époques différentes), on doit se familiariser avec plusieurs personnages et, comme souvent chez Di Fulvio, on a des moments très sombres et violents. Heureusement, je me suis accrochée et j'ai ensuite beaucoup plus apprécié ce Paradis caché : l'intrigue prend très vite une tournure policière (Susanna est-elle innocente ou non et si oui, qui est le coupable ?) et on suit le procès en sorcellerie jour par jour, avec ses codes et ses moments de révélations fracassantes et de coups bas. Le tout est vraiment passionnant, d'autant plus que cela s'accompagne d'une intéressante réflexion sur la religion et ses dérives, la place de la femme dans la société de cette époque, les accusations de sorcellerie, les superstitions... Il y a aussi beaucoup d'amour et d'émotions dans ce roman : j'ai adoré les personnages de Daniele et Susanna, la manière dont leurs destins sont liés, leur relation... C'est vraiment très beau, tout comme les liens qui les unissent au père Thevet, le moine qui les recueille dans son monastère et prend peu à peu la place de figure paternelle dans leur vie. Il y a des moments vraiment très émouvants entre ces trois personnages. La manière dont Susanna tente de révéler le beau dans chacun des habitants du village (surtout les femmes) est admirable également et là aussi, cela donne lieu à certains des plus beaux passages du livre. On ne voit pas défiler les pages de ce roman tant cette intrigue est prenante et tant on s'attache aux personnages. J'avais du mal à imaginer ce qu'allait être la fin et effectivement elle m'a surprise (même si elle m'a rendue triste également). Je trouve cependant que, comme pour le début du roman, la fin comporte quelques longueurs et c'est un peu dommage. Le Paradis caché est le dernier roman écrit par Luca Di Fulvio avant son décès et c'est vraiment un très beau cadeau fait à ses lecteurs que cette belle histoire d'amour, de tolérance et de partage.

Est-ce qu'il t'arrive de pleurer en lisant ? Avant Le paradis caché, je n'ai lu que Le gang des rêves. Sans avoir eu un coup de cœur, j'en ai gardé un bon souvenir de lecture. Je savais, j'espérais passer un aussi bon moment lorsque j'ai débuté cette lecture. Un bon moment ? Non, je n'ai pas eu de bon moment. Dire que je l'ai aimé ou même adoré n'est pas assez fort. J'ai été transportée, subjuguée. Absolument bouleversée. Le paradis caché est une brique d'émotions. De l'amour à l'état pur. J'ai été touchée par la relation de Susanna et Daniele, leur lien si puissant, ce lien où chacun se reconnaît dans les yeux de l'autre et sait sans même se parler. J'ai été émue par les liens entre le père Thevet et ses "enfants". L'auteur a mis mon cœur chamallow à rude épreuve, plaçant l'intrigue au temps des sorcières. Et soufflant sur les braises de l'espoir, ce sentiment qui nous tient vivant. Cette lecture, ô combien révoltante, est si forte. Si intense... Alors je te le redemande. T'arrive-t-il de pleurer en lisant ? Car moi, oui. J'ai pleuré des torrents de larmes pour Susanna et Daniele. Pour leur amour. Pour leur histoire. J'ai pleuré des torrents de larmes pour leur paradis caché, et je n'en ai pas honte. J'aurais seulement aimé, pour eux, que cette histoire se passe à un autre temps... Ce livre est une merveille. Et si tu ne l'as pas encore lu, tu rates une des plus tristes mais des plus belles histoires d'amour de tous les temps.