Cent minutes de silence : Le livre de Christophe Wojcik

Qu’elle est longue et triste cette minute de silence qui conclut un enterrement. Alors quand 100 personnes ont ces soixante secondes pour penser au défunt, cela donne 100 récits différents, tous plus originaux les uns que les autres qui, à la façon d’un puzzle, redonnent vie au disparu. Car il faut dire que dans ce village dépeuplé « qui meurt à petit feu », les commérages vont bon train et il en a fait parler des bonnes âmes ce Lucien Léger de son vivant. Qu’on l’ait trouvé séducteur, affable ou « limite louche », il ne laissait personne indifférent. C’est sûr, sa papeterie artisanale fonctionnait bien mais cette histoire d’extra-terrestres, c’était quand même bizarre ! Et puis, quel coureur de jupons ! Quoiqu’il en soit, ce que l’on ne peut nier, c’est qu’il était exubérant et bienveillant. Alors, pendant 1 minute, tout le monde va se remémorer un souvenir, une rancune, une histoire d’amour ou de camaraderie et, par la plume pleine d’humour de Christophe Wojcik, c’est toute une palette de rapports humains qui vont se dévoiler sous nos yeux, nous révélant petit à petit, la cause de la mort du fameux Lucien Léger. Pendant toute la lecture de ce court roman, je me suis régalée avec ces petites pensées ordinaires qui m’ont amusée dès la première ligne et m’ont laissé le sourire aux lèvres jusqu’à la résolution de cette énigme rurale bien de chez nous. Imbriquées dans une succession d’enchaînements joyeux, tantôt acides, tantôt loufoques, pas de doute, ces 100 minutes de silence « exhalent un délicieux parfum d’éternité ».

Tous les habitants du village sont rassemblés dans le petit cimetière communal pour l’inhumation de Léon, un entrepreneur local, enfant du pays, dont le cadavre désintégré a été découvert dans une carrière désaffectée. Pendant l’obligatoire minute de silence, cent participants à la cérémonie expriment in petto leur sentiment profond sur ce troublant décès. Si quelques pensées personnelles ne servent pas directement la résolution de l’enquête (le chat du cimetière, la pie du coin, un insecte nécrophage qui attend de festoyer, l’enfant de cœur qui s’ennuie, l’ange de passage), toutes les autres (famille, amis, notables, braves habitants) se révèlent importantes pour cerner la personnalité du mort et comprendre l’origine du drame. Avec ce roman aux cent témoignages, Christophe Wojcik fait preuve, comme d’habitude, d’une savoureuse originalité alliée à un sens aigu de la mise en scène littéraire.

/ Lectrice / Christophe Wojcik, quel auteur facétieux ! Il n'a pas l'air d'avoir engendré la mélancolie et on ne doit pas s'ennuyer à le côtoyer au quotidien ! Après avoir lu "Cent minutes de silence", je m'octroie la mienne (minute) pour vous parler un peu de ce livre. Léon Léger est mort. On assiste à son enterrement. Cent personnes sont présentes. Une minute de silence est observée pour rendre hommage à ce gai-luron, bon vivant de son vivant, animant son petit village. Pendant cette minute, chacun laisse libre cours à ses pensées concernant Léon. Voisins, amis, parents, enfants, autres membres de la famille, policiers, enquêteurs... chacun des cent personnages assistant à l'enterrement en a une image différente que nous découvrons sur une page ou un peu plus. Ces minutes mises bout à bout font cent minutes de silence et un livre d'un peu plus de 200 pages. Chaque protagoniste révèle une facette de notre héros du jour et c'est jubilatoire ! Commérages et cancans vont bon train mais les amitiés aussi parce qu'il était aimé de beaucoup de personnes, Léon, notamment de ses 2 fidèles amis Ludo et Louis. Et ses amoureuses, elles étaient folles de lui ! Enfin bref, un personnage ! La plume de l'auteur est agréable, légère, facétieuse bien sûr et élégante, le livre très addictif. Impatients de connaître le fin mot de l'histoire, qui s'avère être assez émouvante, on a du mal à quitter cette lecture. Mais ce qui fait tout le sel de cet ouvrage, c'est la truculence des dialogues intérieurs. Selon la personne qui s'exprime (en pensée), le langage est recherché, convenu ou familier, voire très familier. Même le chat du cimetière et la pie bavarde se font entendre ! Un régal ! "Cent minutes de silence" clôt un triptyque sur la mort dont l'auteur se rit avec un humour à la fois corrosif et tendre. La mort mais pas que, au passage, il égratigne un peu les êtres humains en nous présentant leurs petits travers, toujours avec humour, sans avoir l'air d'y toucher ;) Ce livre suit "Le portable" et "Service après-mort" qui me tentent bien. /// Merci Monsieur Wojcik pour ce moment réjouissant ! /// Et un grand merci à Babelio et aux Editions Héloïse d'Ormesson pour l'envoi de ce livre pittoresque et désopilant dans le cadre de la Masse critique de Janvier ! ….......... Citation 1ère page " / Cueilleur de champignons / C'est-à-dire que moi, les champignons, je les cherche là où ils poussent, rosés des prés dans les parcs à vaches, chanterelles sous les hêtres et les châtaigniers, bolets dans les bois de sapins rouges, sans parler des lépiotes ou des russules, alors j'en vois du pays, d'ailleurs je leur ai dit aux gendarmes quand ils m'ont interrogé, à force de battre la campagne, je finis par faire un peu leur boulot, je fouine, j'inspecte, je ratisse le terrain à leur place, du coup j'en trouve des objets bizarres et des vieilleries, ah ça ! j'en trouve, je pourrais ouvrir un musée des horreurs juste avec les godasses, les obus et les ossements d'animaux, sans parler de ces trucs... comment ils appellent ça de nos jours... des capotes quoi ! Mais là, au fond de la forêt, dans cette carrière désaffectée où plus personne ne va, quel choc quand j'ai découvert les reste de M.Léger encore chaud " ..." Si j'osais un mauvais jeu de mots, je dirais que pour lui, aujourd'hui sonne le glas, tandis que pour moi, demain, vu la petite pluie fine de la nuit et ces quelques rayons de soleil, haro sur les trompettes-de-la-mort ! "

Figure locale de son village, Léon Léger est mort. Son corps est retrouvé dans une carrière près de chez lui. Qu’est-il arrivé à ce chef d’entreprise quadragénaire connu de tous ? Accident ? suicide ? meurtre ? et en ce dernier ce cas, qui pouvait lui en vouloir à ce point ? Nous entrons de plain pied dans le cimetière pour assister à ses funérailles au cours desquelles il est requis une minute de silence. Une foule hétéroclite se recueille. Tour à tour, cent personnes dont sa famille, ses proches, ses admirateurs, ses détracteurs, parmi plein d’autres en passant par le prêtre ou le fossoyeur vont s’exprimer au travers de monologues intérieurs. De la bouche ou plutôt du cerveau de ces protagonistes sortent des mots simples teintés parfois d’un humour macabre salutaire. L’auteur nous propose un récit original à la fois pour faire connaissance avec le personnage de Léon et tenter de percer le mystère entourant son décès. Plus que le suspense, c’est la truculence des pensées qui prédomine. J’ai passé un moment agréable à la lecture de ce court roman. Merci à Babelio et aux éditions Héloïse d’Ormesson de m’avoir permis de découvrir cet auteur dont je ne manquerai pas de lire un deuxième ouvrage.