Germinal : Le livre de Émile Zola

Monument de la littérature à lire absolument ! J'en conseille la lecture. Il faut cependant avoir le cœur bien accroché pour certains passages. C'est l'un des rares romans qui finit bien pour le personnage principal dans les Rougon Macquart. Le quotidien des mineurs est terrible ; de très belles descriptions sont à noter.

Émile Zola n’écrit pas simplement un roman avec Germinal ; il compose une fresque sociale d’une brutalité et d’une vérité saisissantes. Ce qui frappe d’emblée, c’est la puissance des images, cette mine du Voreux qui devient une bête insatiable : "Un air mauvais de bête goulue, accroupie là pour manger le monde." Dès les premières pages, le décor est planté. La mine n’est pas seulement un lieu de travail, elle est une entité monstrueuse qui broie ceux qui s’y aventurent. La famille Maheu en est le plus parfait exemple : six générations de mineurs, du grand-père Bonnemort jusqu’aux enfants de Zacharie. Le travail à la mine n’est pas une vocation, c’est un héritage inéluctable, une fatalité qui enchaîne les générations à la houille et à la souffrance. Si la misère économique est omniprésente, Zola ne néglige pas la dégénérescence physique et morale qu’elle engendre. Étienne, le héros du roman, incarne ce cycle destructeur : "Le dernier enfant d'une race d'ivrognes, qui souffrait dans sa chair de toute cette ascendance trempée et détraquée d'alcool." Son sang porte les stigmates de la déchéance sociale, une tare inscrite dans son ADN qui reflète l’idée naturaliste de la transmission des maux d’une classe opprimée, fil conducteur de la saga des Rongon-Macquart. Les relations humaines dans Germinal sont marquées par la brutalité et l’arrangement social plus que par l’amour. Les adultères sont monnaie courante et acceptés de tous : La Levaque et son propriétaire Bouteloup, La Pierronne et le maître porion, Mme Hennebeau et le petit Négrel. Des liaisons où le désir et la domination sociale s’entrelacent, où la sexualité devient une autre forme de pouvoir et d’échange, aussi froide et mécanique que la mine elle-même. Le capitalisme déshumanise, écrase et méprise ceux qui lui permettent d’exister. Les riches observent la grève des mineurs d’un œil moqueur, sûrs que la faim finira par les soumettre : "Quand ils auront trop faim, ils retourneront aux fosses.", "Lorsqu'ils auront bien crié, ils iront souper avec plus d'appétit." Ces paroles d’Hennebeau et de Grégoire résonnent comme une insulte à la détresse ouvrière. Le mépris de classe est total, inconscient ou volontaire, mais toujours brutal. Mais ce sont les corps qui en paient le prix, notamment celui des femmes. Catherine incarne ce destin tragique, celui d’une fille née pour souffrir et mourir dans l’indifférence : "Non, non, non, je ne veux pas", crie-t-elle face à Chaval, avant que son refus soit ignoré. "Elle se défendait sans révolte, avec la résignation passive des filles qui subissent le mâle de bonne heure." Une phrase qui glace le sang, où la soumission féminine est peinte comme un conditionnement social plus fort que la violence elle-même. Face à cette oppression, la révolte gronde. Mais Zola ne nous donne pas une révolution idéalisée. La colère des mineurs est sauvage, incontrôlable. Elle détruit sans discernement, elle avale les innocents comme Cécile, simple dommage collatéral de plus. Et lorsque l’anarchiste Souvarine intervient, il ne prêche pas un idéal, mais un chaos destructeur : "La terre lavée par le sang, purifiée par l'incendie ... on verra ensuite." L’explosion finale, ce trou béant sous la mine, avale aussi bien les opprimés que les oppresseurs. Mais si Zola nous montre l’échec de cette révolte, il nous laisse entrevoir un espoir, une germination future. Germinal est un livre qui ne laisse pas indemne. Il bouleverse par sa violence, par son réalisme, par ses personnages brisés qui continuent malgré tout à avancer. C’est un cri d’alarme, une fresque cruelle et nécessaire qui, encore aujourd’hui, trouve des échos dans notre monde. #128293; Un chef-d'œuvre qui hurle la misère et la révolte, un roman essentiel qui bouscule et réveille.

Germinal est un classique qui se doit d'être lu. Zola a une très belle plume, son écriture emporte dès les premières pages dans le monde de la mine. La qualité de ce livre se trouve sans aucun doute dans la complexité du personnage d'Etienne, évoluant au gré de l'avancée de la grève. Cependant, certains autres personnes m'ont laissé dubitative et je n'ai pas toujours compris leurs choix et (in)actions.

La force de la plume de Zola jonche ces pages d'un précieux hommage au prolétariat. Lisez ce livre. Il éclaire la révolte. Les cycles du pouvoir ressortent de plus belle, nous plongeant pages après pages dans l'impuissance d'Etienne Lantier et sa lanterne, qui ne tardra pas à s'embrasser.