La ballade de l'impossible : Le livre de Haruki Murakami

Des années que je n'avais pas lu Haruki Murakami. J'avais tort. La ballade de l'impossible est à mon sens un très grand livre, celui d'une génération, qui est d'ailleurs la mienne. Versant japonais bien sûr mais largement extensible à l'Occident. Le mal de vivre n'est-il pas lui aussi victime de la mondialisation? Le personnage, Watanabe, est un jeune homme de vingt ans ou presque, en 1969. Un héros ordinaire qui vit sa vie tant bien que mal, amours contrariées, le goût des alcools, sexualité, espoirs et craintes, terriblement vivant malgré la présence un peu obsédante de suicides dans son entourage. Il y a là-dedans du Holden et du Gatsby, Salinger et Fitzgerald, ça vous pose une jeunesse. Watanabe écoute les Beatles, et écouter les Beatles alors qu'ils sont déjà en voie de séparation, c'est une aventure en soi. C'est qu'on a compris que le plus pur, le plus marquant, le plus privilégié de nos jeunes années, tout ça s'apprête aussi à se faire la malle. Je crois avoir vécu ça très précisément, jeune homme plutôt intimidé que j'étais. L'étudiant nippon traverse quelques hésitations, des amours de blues et d'accords mineurs, tout cela comme une symphonie de poche mélancolique. Car bien sûr on connait presque tous au moins un peu Murakami et l'on connait sa passion pour le jazz, le rock et la musique en général. Je crois que chacun peut se retrouver dans La ballade de l'impossible. Toute jeunesse me semble inapte à la réussite totale et c'est très bien ainsi. Nous sommes faits de nos meurtrissures et les rencontres de Watanabe et des femmes de ses vertes années, Naoko, Midori, Reiko, sont autant de gammes entre maladresses et presqu'extases, comme il existe des presqu'îles dont il est salutaire parfois de s'éloigner même si l'isthme échappatoire est étroit voire dangereux. Car dans l'œuvre de Murakami l'essentiel réside aussi dans le côté border line de tous les protagonistes. Lisez ce livre formidable, n'attendez pas le Nobel dont cet immense écrivain n'a que faire, et (pas) accessoirement réécoutez Rubber soul, le magique album des Beatles dont Norwegian wood est l'une des pépites. Cette mélodie ouvre le livre dans un avion atterrissant à Hambourg, le passager Watanabe est pris d'une émotion fulgurante. Il a alors trente-sept ans et se remémore l'année de ses vingt ans. Et du coup, moi aussi. Ca pique un peu.

Très très beau roman. 5eme roman de l auteur, sans doute l un des plus autobiographiques, il n appartient pas à l univers onirique entre réel et irréel qui caractérise Murakami. Des lors ceux qui n aiment pas cet univers particulier, pourront découvrir et apprécier la très belle plume, dépouillée de l irealite, et le talent d analyse des méandres de l ""ame" humaine et des sentiments. Pour ceux qui justement aiment cet univers, vous ne serez pas déçus pour autant car tous les prémisses de cet univers sont déjà omniprésents. Et l on comprend comment l irealite et ces mondes parallèles sont devenus chez Murakami une autre forme d expression de son hyper sensibilité face à la mort, à la mémoire et la perte, une manière de la transformer en poésie. Tous les grands thèmes de Murakami sont déjà présents : la mort, la disparition d êtres chers, l impossible deuil et la solitude. La montagne est l éternel refuge hors du monde comme dans le meutre du commandeur. Les ballades urbaines et les voyages d errance sont autant de réconforts et de temps du retour à soi peuples de rencontres inspirantes. Pourtant rien n est sombre car la vie intense , pleine de "gastronomie" , de boissons et de sexualité , est là partout pour consoler et continuer la route. C est très joyeux et très irrévérencieux. Une fois encore, le Japon de Murakami, fut il ici bien ancré dans la réalité, est très éloigné des " images d Épinal " de la tradition japonaise. Et Tokyo est la ville des excès, des solitudes de la modernité comme dans Kafka ... Ce roman est aussi un beau témoignage de la vie étudiante dans le Japon de 1968. C'est une éducation sentimentale et le passage à l âge adulte d un jeune homme et de ses compagnes . Bel hommage et clin d œil à Fitzgerald et Salinger dont l auteur en est le fidele traducteur . Avec surprise , ce roman plus classique dans sa forme, s avéré être d une puissance que l on oublie difficilement . Bien que restant impossible, cette ballade est un grand coup de cœur.

[masquer]Le récepteur à la main, je levai la tête et regardai tout autour de la cabine téléphonique. Où étais-je ? Je ne savais pas du tout où je me trouvais. Je n'en avais aucune idée. Quel était donc cet endroit ? Je ne voyais que des silhouettes innombrables qui marchaient. De cet endroit au coeur de nulle part, je finis de lire La Ballade de l'Impossible. . Dans un élan mélancolique, j'ai été transporté dans les souvenirs de Watanabe. À la fin de ma lecture, l'impression de me réveiller après un sommeil profond d'un long rêve me faisait reprendre conscience de mes sensations physiques et, comme si je rennaissais, j'ai soudainement était épris d'une motivation nouvelle. [/masquer]

#10084;#65039;#10084;#65039;#10084;#65039;#10084;#65039;#129293; Encore un joli conseil de lecture d'une amie ! Watanabe, le temps d'un voyage, est propulsé 19 ans en arrière et se replonge dans ses émotions de jeunesse, entre la perte de son meilleur ami et la naissance d'un amour impossible. Cet auteur japonais (que je découvre totalement) a une plume d'une poésie folle, il est difficile de décrire la délicatesse avec laquelle il parle aussi bien d'amour, d'amitié, de famille que de maladie mentale. C'est doux, sensuel (parfois très érotique même), bouleversant et excepté les quelques lenteurs du début, les pages s'enchaînent ensuite et happent le lecteur dans un récit aussi tendre que profond, j'ai beaucoup aimé ce roman pourtant éloigné de mon style habituel !