Le dernier jour d'un condamné : Le livre de Victor Hugo

Cette nouvelle de Victor Hugo m’a profondément touchée. Les mots qu’il choisi sont justes et troublants. Je ne pourrai pas dire que les mots m’ont permis de me mettre à la place du personnage, du condamné, tant la situation est particulièrement difficile et désagréable. Pourtant la retranscription n’en est pas moins éprouvante. Une lecture rapide et éloquente jusqu’à son point final.

Je découvre (enfin) Victor Hugo par ce livre. Et que dire à part : génie. Le récit à la première personne nous transporte directement à la place de ce personnage principal dont on ne connaît presque rien mais à qui on s’attache quand même énormément. Le chapitrage renforce cette idée de fuite en avant impossible à freiner. Formidable roman qui m’a laissé scotché et qui me donne encore plus envie de lire les autres grands classiques d’Hugo.

Je suis passée d'un roman de Flaubert à ce roman à thèse de Victor Hugo, alors cette lecture a été d'une fluidité sans nom. Des chapitres entiers pourraient être des poésies à eux tout seuls. J'ai été sensible quant à la plume de Victor Hugo. Il transmet un message important pour son époque, c'est un plaidoyer politique publié anonymement pour l'abolition de la peine de mort. En surface, la guillotine n'est qu'une demi seconde de "souffrance". Mais quand on vit cette sentence, l'attente n'est que torture. Avec cette absence de liberté, notre existence est réduite à un cachot, et à un objet de spectacle Place de Grève. J'ai réussi à ressentir l'exaltation de pensées que traversait le condamné, ce qui fait la force de son récit. Il permet par la suite de se mettre à la place des condamnés à mort, et d'abolir ces conditions. J'ai trouvé intéressant cette contradiction entre l'aliénation des condamnés, qui sont morts avant même de mourir, et d'un autre côté des actes humains, des petites attentions comme la présence du prêtre, la visite de M.(...), et le bourreau qui ne veut pas faire de mal au condamné durant sa dernière toilette. Pour finir, l'auteur dénonce aussi la royauté, qui a le pouvoir absolu, le destin du peuple entre ses mains. Il le dit lui-même, une lettre où le nom du roi figure suffit à ôter la vie ou non d'untel. J'ai donc apprécié cette œuvre, pour la critique qu'il a pu émettre de son époque, ainsi que sa plume et la fluidité de son récit.

Quelle belle manière aura utilisé Victor Hugo pour combattre cette absurdité qu'est la peine capitale encore en application dans bien des pays. Ce texte est écrit à la première personne, nous nous retrouvons à la place de ce condamné dont on ne connaît, ni son âge, bien que l'on comprenne qu'il est trop jeune pour mourir, ni son nom, ni son travail. Il a une famille, une femme et une petite fille. Au delà de sa mort, il dénonce aussi la souffrance de sa famille. De ce condamné, nous ne connaissons que sa condamnation, la peine capitale. La guillotine, inventée pour rendre à la mort sa dignité, dont l'inventeur se verra refuser le brevet par la France, encore une contradiction "à la française". Nous ne saurons pas quelle faute aura t-il commis, mais mérite t-elle la peine capitale. Qui mérite la mise à mort ? Ce dernier jour est horrible, trop vite passé. Les acteurs de cette mise à mort sont autour de ce condamné, soudain respectueux, craintif, ils vont lui voler sa vie, lui ôter ce que nous avons de plus cher. Victor Hugo nous emmène dans les geôles, sales et impersonnelles, ou les condamnés, les célèbres comme les anonymes, essayent de laisser une trace de leur passage sur cette terre. C'est poignant, mais c'est loin d'être de la fiction. La France n'a aboli la peine capitale qu'en 1981. Combien d'hommes et de femmes auront eu la tête tranchée pour un crime qu'ils auront commis ou pas. Victor Hugo nous délivre non pas une nouvelle, mais un cri de rage, de désespoir, contre la bêtise humaine.