Marie-Antoinette - Portrait d'une femme ordinaire : Le livre de Stefan Zweig

Grand format

Bouquins

0 personnes ont réagi

À l'occasion du 230e anniversaire de la mort de Marie-Antoinette, la biographie, une des plus belles du genre, écrite par Stefan Zweig et consacrée à la reine à découvrir dans une nouvelle traduction.

Appellation surprenante pour cette reine en qui la France aujourd'hui encore voit un de ses fleurons. Ici Marie-Antoinette est vue par les yeux d'un Autrichien, donc d'un compatriote, qui certes brosse d'abord un portrait historique rigoureusement fondé sur des documents d'archives (notamment correspondances diverses) mais en le plaçant dans un éclairage psychologique, et même freudien, auquel Zweig a si souvent recours dans ses nouvelles (rappelons que Zweig et Freud se vouaient une admiration mutuelle). Ce sont les circonstances successives qui modèleront les comportements variés et souvent condamnés de son existence : utilisée comme pion sur l'échiquier politique des alliances de l'époque, mariée à quatorze ans au futur Louis XVI qui sera impuissant durant sept années, reine à 18 ans, elle se " défoulera " dans une dispendieuse exubérance compensatoire, au grand dam de sa mère Marie-Thérèse ; spontanée, étourdie, irresponsable elle jettera l'argent par les fenêtres de son luxueux Trianon qu'elle a entouré d'un " hameau " reconstitué et peuplé de figurants, tandis que le vrai peuple vit dans la misère. On profitera de son inconstance pour la berner, notamment dans l'Affaire du collier ici brillamment narrée dans une prose digne d'Agatha Christie. La jeune femme adulée à son arrivée en France ne tardera pas à y devenir l'ennemie publique numéro un... jusqu'à son procès où elle deviendra totalement autre : c'est dans l'adversité que la jeune écervelée gagnera l'étoffe d'une reine, d'une femme éprouvée et mûre, profondément humaine, voire tragique.

Beaucoup d'encre a coulé sur les frasques de Marie-Antoinette, mais ici le style de Zweig devient un acteur de premier plan : flamboyant, métaphorique, tantôt analytique tantôt empathique, toujours passionné et sous-tendu par une implication auctoriale partiale, celle d'un homme qui comprend une femme, mais sans jamais l'excuser. C'est ce style que la nouvelle traduction a fidèlement restitué. Le narrateur se déplace telle une caméra dans le somptueux Versailles et parcourt les arcanes des multiples intrigues coutumières, il est omniprésent, évoluant dans les décors et dans les têtes, y épousant toutes les circonvolutions, on s'y croirait !

Cette biographie, une des plus belles du genre, est effectivement celle d'une femme ordinaire qui, comme le dira à son procès l'avocat de la défense, " a eu le malheur d'être reine " : une femme qui aimait la vie et voulait profiter de sa jeunesse, sans pour autant faire du mal consciemment, et qui a dû être confrontée à l'exceptionnel et au grandiose pour devenir une figure historique extraordinaire.

De (auteur) : Stefan Zweig
Traduit par : Françoise Wuilmart

Fermer
 

Expérience de lecture

Avis Babelio

Annette55

4.00 sur 5 étoiles

• Il y a 1 semaine

Je ferai très court car tout a été dit déjà : Marie -Antoinette est une reine très méconnue . Au coeur de cet excellent récit , à la fois épique et scrupuleux l'auteur analyse , dissèque avec une minutie ,une rigueur ,, une belle sensibilité les raisons du glissement vers l'impopularité de cette reine, acclamée, admirée avant de devenir «  la maudite » , la source de toutes les haines , victime qu'elle fut de manoeuvres politiciennes, d'intrigues hypocrites , de factieux avides de scandales , de ragots , une évolution consécutive à l'arrivée de cette gamine de quatorze ans , trop tôt appelée au trône , très naïve , futile, insouciante, avide de fêtes splendides , de distractions , complètement immature ,ne pensant qu'à ses toilettes à la merci des » bonnes âmes «  , ces trois vieilles filles du roi Louis XV, jalouses , idiotes , … La sombre histoire du collier , habilement exploitée par nombre de ses ennemis éloignera inévitablement,inexorablement Marie- Antoinette, de son peuple qu'elle n'a pas appris à connaître ,d'ailleurs . Il n'y a qu'à la fin de sa courte vie qu'elle se révélera enfin une femme courageuse, réfléchie ,à la lumière de la souffrance , adulte enfin, mais il est trop tard…. Nous suivons cette reine de la chambre de son «  nonchalant mari «  ,Louis XVI un peu balourd, jusqu'à l'ultime lit de la guillotine.… Il fallait l'immense savoir- faire de l'auteur pour évoquer «  la chimie d'une âme » , une biographie parfaitement étayée ,très complète, documentée , brillante , de cette reine méconnue , vilipendée par les uns , sanctifiée par les autres ,impétueuse et naïve .Quelle histoire ! J'ai été bluffée par le souffle romanesque de l'ensemble ,des mots justes pensant à la destinée singulière de cette femme aux heures sombres de l'histoire . Une biographie remarquable ,épique ,un coup de coeur ! Je n'en dirai pas plus. Mais ce n'est que mon avis , bien sûr .

Signaler

Ngc

4.50 sur 5 étoiles

• Il y a 1 semaine

Précipitée par la superbe critique d'Aurea (que je n'escompte pas égaler ici), mon envie de lire cette biographie de Marie-Antoinette par Stefan Zweig s'est rapidement concrétisée par le passage à l'acte, puis transformée en un plaisir délectable et diffus tout au long des presque 500 pages. L'auteur autrichien habille de sa plume délicate une histoire merveilleusement dramatique et ramène à un plan plus humain et plus proche de nous un personnage historique dont les contours un peu flous prennent ici des formes nettes, en tout cas plus précises. Marie-Antoinette se révèle être la jeune fille d'abord plongée trop tôt dans un monde d'adultes, lui demandant d'assumer et d'endosser des responsabilités incompatibles avec son jeune âge. Les signes du destin relèvent d'ailleurs poétiquement et dramatiquement le sombre futur qui lui est réservé, comme le signal un Goethe encore tout jeune. La plume de Zweig éblouit tout au long de ce récit, qui ne s'embarrasse pas trop des dates et de précisions "académiques" ou scolaires, et l'encre coule avec une limpidité comme les années d'insouciance de la jeune reine. Clair, somptueux de variété dans le vocabulaire, on ne pourra que reprocher à l'auteur ses quelques répétitions de certains traits de caractère du personnage, comme pour mieux souligner sa joie de les avoir découverts et/ou compris ; ce défaut se retrouve toutefois noyé sous le génie de l'écrivain quand il s'agit de ciseler les contours de personnages plus complexes qu'il n'y paraît au premier abord. Le contenu mirobolant de la vie et des évènements du couple royal, loin de celui énoncé dans le journal du roi qui prend des allures franchement comiques car continuellement centré sur la chasse, fournit la matière à ces centaines de pages mêlant politique, vie de Bohême, vie sexuelle, romance, famille et révolution. Plus qu'une histoire fondée sur la vie d'une personne, ce Marie-Antoinette est un angle nouveau sous lequel découvrir des aspects de la Révolution française, et ce même si l'on pourra toujours s'interroger sur les fondements de certains faits historiques racontés dans le livre. Mais à moins d'être un spécialiste ou historien en herbe, difficile de critiquer cet aspect du récit. La narration prend merveilleusement des allures de roman et s'éloigne de l'austérité voir de l'ennui que peut offrir un livre d'histoire. Ce style souligne aussi la dimension psychologique et émotionnel de personnages qui avant d'être de grandes figures historiques, sont avant tout des êtres humains qui n'appartiennent pas aux autres ou à l'Histoire mais à eux-même. Des individualités en somme. Émouvant, instructif et tout simplement digne d'une œuvre d'art dans sa conception et son écriture, Marie-Antoinette est une biographie bouleversante et plaisante à lire même si l'on a pas d'intérêt à la base pour ce genre et pour cette période. Un vrai tour de force.

Signaler

Denis3

5.00 sur 5 étoiles

• Il y a 1 mois

Une oeuvre exquise, une de plus à l'actif de Stefan Zweig. L'oeuvre est exquise, mais la vie tragi-comique. Une petite fille, si remuante, si espiègle et si distraite que de nos jours on consulterait. A treize ans, elle sait lire ( mais ne lira jamais rien), écrire ( très mal) et c'est là l'étendue des connaissances de celle qui est promise au dauphin comme future reine de France. Il faut cimenter l'alliance des Bourbons et des Habsbourg, face à ces nouveaux venus que sont les Anglais et les Hollandais. Un mariage s'impose donc pour sceller l'entente, et elle est choisie parmi les filles de l'impératrice Marie-Thérèse. Exécution ! Commence alors une vie à Versailles, en tant que dauphine. L'étiquette y est bien plus sévère, le protocole bien plus lourd qu'à la cour relativement bourgeoise de l'impératrice d'Autriche. Hors messes et repas, la dauphine n'a rien à faire. Si ce n'est de servir de cible à toutes les commères qui peuplent ce nid de guêpes. Jeune, naïve, malléable adolescente, Marie-Antoinette est la plus facile des proies. Côté masculin, ce n'est pas la joie non plus. le futur Louis XVI ne s'intéressera jamais qu'à la chasse au cerf et à la serrurerie. Borné, poussif, routinier à faire pâlir un bedeau. Un veau. Un veau et une midinette, voilà le couple royal bientôt doté des pouvoirs de monarques absolus. Et ceci alors que la France, ruinée par les guerres de Louis XIV, par Versailles et par les maîtresses royales ( seul Louis XVI fera exception) est épuisée. Si Louis XVI n'a pas de maîtresse, sa femme, elle, n'a rien à envier à la Montespan ou la du Barry au chapitre des dépenses somptuaires. Véritable feu d'artifice humain, elle éclate dans toutes les directions dès les lendemains du couronnement. Robes, coiffures, bijoux, jeux de hasard ! Jeux de hasard et visites de tous ces lieux plus ou moins sombres où l'on danse, où l'on courtise. Au vu et au su de tous. En compagnie d'un aéropage de parasites, de prédateurs qui l'encouragent, qui font payer leur compagnie en offices et prébendes. Car ils savent que ce veau de Louis signera tout ce que sa femme lui soumettra. Tant qu'on lui laisse les cerfs du parc, il est heureux. C'est ainsi que Marie-Antoinette s'empare peu à peu du pouvoir, au profit de ses courtisans. Et que les millions coulent à flots, des années durant. Folie suprême, folie ultime : elle se fait construite un petit monde en miniature ; le Trianon. Elle quitte même Versailles pour y habiter ! Erreur suprême, erreur fatale. La Cour se sent dépossédée au profit de la coterie qui entoure la reine au Trianon. L'aristocratie se tourne contre Marie-Antoinette. Les crises financières succédant aux crises financières, une partie de la bourgeoisie suit. Quant au peuple, une ou deux mauvaises récoltes suffiront à transformer sa colère en rage. le tout merveilleusement attisé et orchestré par les deux frères cadets du roi, les futurs Louis XVIII et Charles X. Qui ont, bien entendu, des visées dynastiques et ne se rendent pas compte que c'est tout l'Ancien Régime qui va exploser. Un veau et une ravissante idiote entrèrent, en tout innocence, dans une poudrière…Drame, tragédie ou comédie ? Il y a tout cela dans la vie de Marie-Antoinette, et Zweig sait le rendre avec la richesse, l'entrain et la persuasion qu'on lui connait. Grand coup de coeur !

Signaler

CarolineCF

3.00 sur 5 étoiles

• Il y a 1 mois

Lu sur ma liseuse, pendant les insomnies. J'attendais beaucoup de cette biographie car c'est un genre que j'aime et j'aime le style de Zweig dans ses romans et nouvelles. Peut-être ne suis pas assez fan de Marie-Antoinette... Peut être, le genre biographique bride un peu le élans romanesques de Zweig. Difficile à la fois d'être fidèle à une vérité historique et donner du souffle, du lyrisme à une vie dont on sait presque tout. Finalement, c'est par le drame de la courte vie de Marie Antoinette, élevée au plus haut avant de finir seule, dans une geôle sans lumière, de mourir avec dignité voire majesté, guillotinée publiquement, abandonnée de tous, son corps jeté dans la fosse publique, la tête entre les jambes, que le sens de cette biographie est donné. Son histoire commence avec sa mise sur le marché du mariage, quand sa mère la puissante Marie-Thérèse se sert d'elle pour faire alliance avec le roi de France, le XV, et la donne à la France. Elle est pubère tout juste et a 14 ans. Son fiancé en a 15. Son histoire finit comme on sait, veuve Capet, seule, les cheveux blanchis, et souffrant d'importantes hémorragies. Et oui, le sang, celui des règles, de naissances, de la mort...et celui qui est royal. Dès le début, tout est dit. Peu éduquée, peu instruite, mal préparée à son rôle de reine d'un puissant royaume, elle trouvera sa dimension dramatique dans les derniers temps de sa vie, quand elle se saisira de son destin tragique, de la misère de ses derniers jours pour relever la tête avant qu'elle ne tombe. Ce livre a été écrit en 1933, Zweig s'est appuyé sur des archives, en Autriche, des correspondances, aux archives nationales. Et quand il n'a pas de traces, il comble les vides sans le cacher, comme les relations entre Fersen et la reine - ont ils couché oui ou non ? Sweig est aussi un proche de Freud, les questions de sexualité sont promimordiales. Le fait que pendant 7 ans, rien, nenni ou presque entre M. A et Louis XVI explique qu'elle se soit jetée comme une folle dans des fêtes, des dépenses, s'étourdissant, frustrée de vie sexuelle normale. On peut le comprendre.... Mais c'est un peu court peut être comme explication. L'autre explication de Zweig est plus crédible. Peu instruite, mal éduquée pour un monde qui disparaît, elle n'a aucun moyen de comprendre ce qui se passe. Peu curieuse, elle ne quitte pas son château, son Trianon, pour aller voir au delà, apprendre en dehors de ce dont on lui a dit que c'était tout, le reste n'étant rien. Reine, femme d'un roi au pouvoir absolu, de droit divin, pouvait elle imaginer une autre réalité ? Victime de Louis XVI ? Sans envergure, mou, impuissant, incapable de prendre une décision, mais laquelle aurait il prendre ? Et heureusement pour nous, non ? De bons moments de lecture, l'affaire du collier j'ai enfin compris le complot -la fuite à Varennes, et bien sûr, la fin. On comprend aussi comment la famille de M. A l'a abandonnée et comment les frères de Louis XVI ont savonné la planche à Charlot pour servir leurs ambitions de devenir roi à la place de ce grand frère, myope, timide et plus intéressé par la chasse, la serrurie et les sciences que par les affaires du royaume. Depuis, nous avons eu des nouvelles de M. De Lapérouse et elles ne sont pas bonnes. Si M. A n'avait pas eu la fin que l'on connaît, elle n'aurait pas eu la même destinée romanesque.

Signaler

Livres du même auteur

Les livres de la même maison

Fiche technique du livre

  • Genres
    Sciences Humaines & Savoirs , Histoire
  • EAN
    9782382924792
  • Collection ou Série
  • Format
    Grand format
  • Nombre de pages
    560
  • Dimensions
    242 x 155 mm

L'auteur

Stefan Zweig

Découvrir l'auteur

Nous sommes ravis de vous accueillir dans notre univers où les mots s'animent et où les histoires prennent vie. Que vous soyez à la recherche d'un roman poignant, d'une intrigue palpitante ou d'un voyage littéraire inoubliable, vous trouverez ici une vaste sélection de livres qui combleront toutes vos envies de lecture.

24,90 € Grand format 560 pages