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Par Philéas, publié le 25/08/2022

La Source: découvrez la BD événement !

Le monde s'est effondré, le temps de la reconstruction est venu…


Mais l'unité de la communauté de La Source est ébranlée par une série de meurtres violents qui met en péril cette nouvelle société déjà bien fragile. Rachel est désignée pour enquêter, promue Gardienne du Talion.


Un polar âpre mis en lumière par ses auteurs, Olivier Truc, Gael Branchereau et Sylvain Runberg, dans cette interview inédite...

 

1) D’où vous est venue l’idée de cette histoire ?

Sylvain Runberg : A la base, je voulais développer un polar d’anticipation qui se passe après ce qu’on appelle "l’effondrement" de nos sociétés, à cause des crises climatiques et environnementales qui sont en train de nous frapper de plein fouet.

Dans un monde où nos technologies ont disparu, où les organisations économiques et politiques qui sont les nôtres ont été balayées, où la vie au jour le jour est rythmée par des besoins essentiels désormais souvent hors de portée, se nourrir, se soigner,  survivre tout simplement, quelle serait le rôle de la justice, de la loi, d’une police en cas de crime ? Quelles visages ces institutions et ces notions désormais disparues pourraient avoir dans un tel cadre, comment les recréer, les adapter ou les réinventer ? 

 

2)     Y-a-t-il une forme de reportage dans l’approche de cette bande dessinée ?

 

Olivier Truc : Par ma double expérience de reporter et d'auteur de polar, l'enquête est au coeur de ces deux démarches. Et La Source n'échappe pas à cette approche, dans le sens où à travers l'enquête de Rachel, le lecteur découvre aussi un monde nouveau et son organisation, les rapports humains et les coulisses de ce monde, ce qui est le propre du reportage, de donner à voir et à entendre au lecteur un monde auquel il n'aurait lui-même pas accès.

Gael Branchereau : On est vraiment dans la fiction, c’était la condition pour écrire La Source. Le récit s’appuie plus ou moins volontairement sur la somme de nos expériences et de nos connaissances sur les enjeux abordés - le contrat social, l’économie de subsistance, les plantes médicinales, l’artisanat, l’énergie, la faune sauvage, etc - mais ça s’arrête là.

Ce n’est pas une proposition politique, plutôt une question. On s’est demandés à quoi pourrait bien ressembler une communauté humaine essayant de survivre après l’effondrement dans un environnement hostile, comment des personnes ayant subi les traumatismes du chaos, de la violence, de la perte et de l’exil peuvent essayer de bâtir un groupe social sur des bases différentes de celles qui prévalaient avant, avec davantage de délibération, pas ou moins de hiérarchie, une réponse différente à l’infraction, une répartition plus juste des activités de production, etc…

Autant dire que c’est aussi ce qui a suscité le plus de débat entre nous (rires).

 

3) Le monde de « La source » est atteint par un bouleversement climatique ravageur. Quel message avez-vous voulu mettre en avant ? Pourquoi ?

O.T : La question climatique et les réponses que l'on y apporte ou pas doivent être au premier plan de toute démarche humaine aujourd'hui et demain, tout simplement parce qu'au-delà des crises, guerres et conflits de toutes sortes, qui peuvent trouver parfois des solutions plus ou moins rapides, la question du changement climatique, elle, ne disparaitra pas comme par magie. 

G.B : Sylvain, Olivier et moi sommes sensibilisés depuis longtemps aux menaces du réchauffement climatique, à la raréfaction des ressources naturelles, à la perte de biodiversité... Je travaille à l’étranger mais je vis par intermittence depuis plus de 25 ans dans les pays nordiques, comme mes co-scénaristes, et nous voyons depuis de nombreuses années avec acuité les effets du réchauffement dans les régions arctiques: l’hiver ressemble à l’automne d’il y a 30 ou 40 ans, les rennes n’ont plus accès au lichen parce que la pluie gèle la neige, les lacs gèlent moins longtemps et la couche de glace diminue (ce qui rend, pour parler encore des rennes, les transhumances dangereuses), la Baltique s’atrophie à cause des nitrates, même les feux de forêt que l’on croyait réservés au sud de l’Europe se multiplient l’été en Suède.

Dans La Source, nous n’identifions pas précisément l’origine de l’effondrement, mais est-ce encore nécessaire?

S.R : Il y a des solutions, il y a encore de l’espoir, mais il faut rompre absolument avec le modèle productiviste qui est le nôtre, afin de freiner le réchauffement climatique mais aussi de changer de paradigme par rapport à ce qu’on appelle la croissance économique. Nous vivons dans un monde aux ressources limitées, c’est la réalité.

C’est aussi le propos de La Source, même si ici, malgré l’effondrement qui a eu lieu et les difficultés immenses que nos personnages doivent affronter, le climat leur permet encore de vivre. En réalité, si ça se passait vraiment mal, ça ne serait même pas le cas. On a donc encore gardé une petite dose d’optimisme dans ce récit d’anticipation.

 

4)    Quelle est la place de la loi de Talion dans le récit ? Que symbolise-t-elle ?

S.R: La communauté de La Source, où se déroule ce récit, est basée dans un petit village français qui a été ré aménagé par ses membres, se fonde sur l’entraide, le respect, la notion de vivre ensemble. Mais La Source doit à la fois composer avec un environnement extérieur qui peut être dangereux – d’autres communautés ou groupes ne sont pas dans cette optique pacifiste.

G.B: Il faut avoir en tête que les membres de la communauté de La Source sortent d’une période de grande violence. Les ressources se sont taries en même temps que l’Etat s’est effondré : plus de flics, plus de juges, plus d’enseignants, plus de médecins, et une population terrorisée, à la merci de bandes mafieuses plus ou moins organisées, qui n’auront jamais à répondre de leurs crimes.

O.T: L'un des thèmes que nous voulions développer avec La Source est la réinvention de nouvelles notions de justice dans une société qui a balayé ses anciennes valeurs qui ont conduit à l'effondrement.

Après le massacre d'une famille, la communauté de La Source est acculée à nommer un enquêteur, alors qu'elle voulait justement éviter d'avoir à entrer dans ce type de logique par rejet du monde d'hier. Avec la nomination de Rachel à cette fonction, La Source veut justement éviter cette fameuse loi du Talion, une forme de justice ancienne qui exige que le coupable subisse une punition du même ordre que le tort qu'il a commis.

La Source sera-t-elle capable de trouver une alternative à la vengeance pure et simple? Cela met à l'épreuve la capacité des habitants de La Source à se dépasser.

 

5)    Quelle émotion, la plus forte, avez-vous voulu procurer au lecteur ?  

O.T: Je ne sais pas s'il s'agit d'une émotion, mais en tout cas ce que nous avons essayé de montrer est l'épreuve que constitue la volonté d'aller contre ses penchants naturels, la loi du Talion. Cela demande un effort personnel et collectif.

S.R: La tension. En s’immergeant dans un récit où se côtoient deux genres, le polar et l’anticipation, dans un futur définitivement non souhaitable.

G.B : N’en déplaise à Bourdieu, je suis fasciné par les faits divers. En tant que journaliste, j’ai suivi un certain nombre d’enquêtes et de procès criminels, et pour beaucoup d’entre eux j’y ai trouvé des enjeux très politiques. Tout ce qui compose un fait criminel peut se résumer, en bout de chaîne, en deux mots opposés: justice et injustice. C’est pour moi le ressort émotionnel le plus puissant, d’autant plus quand le préjudice est exorbitant. Il y a cela, je crois, dans La Source.

 

6)    Quel est votre personnage préféré de cette histoire, pourquoi ?

O.T: Mon personnage préféré est bizarrement un personnage qui n'était pas dans le casting de départ, il s'est invité en cours d'écriture, il s'agit de l'Epouvantail, un personnage mystérieux qui vit en reclus sur les hauteurs de La Source, qui effraye tout le monde, vole des brebis, mais que les habitants de La Source tolèrent pourtant. Il incarne le traumatisme auquel ont été confrontés tous les habitants, et on le tolère car il est un rappel vivant des conséquences des mauvais choix effectués par les sociétés passées. L'Epouvantail est le symbole de la souffrance du monde, et à ce titre, les habitants de La Source sont rappelés par sa présence à l'obligation d'essayer de faire mieux que les générations passées.

G.B : Sans hésitation, La Source elle-même, au sens propre comme au sens figuré. La source, c’est d’abord la source de vie sans quoi rien n’est possible. L’enjeu de l'eau, dans les années, les décennies qui viennent, est immense. L’enjeu de la ressource, les épisodes de canicule et de sécheresse qui s’intensifient, au nord comme au sud, avec ce que cela suppose de famines, de morts, de migrations, de conflits, mais aussi l’enjeu de la submersion, la disparition de territoires entiers, de civilisations et de cultures millénaires. La source au sens figuré aussi, c’est-à-dire la source de l’effondrement, la source de la communauté et la source des trajectoires individuelles qui la composent.

La source, c’est la confluence des sources, qui elle-même fait l’histoire, une histoire… en BD.

 

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La Source
« Il y a, dans la nature humaine, un fond de barbarie qui regarde la loi du Talion comme la vraie justice, et ressent, dans l’attente des châtiments sanglants, une soif aveugle. » - François Guizot

Après la catastrophe, un bouleversement climatique aux effets ravageurs, il est temps pour la reconstruction...
Le massacre d’une famille d’herboristes essentielle à la survie de La Source oblige ses habitants, une petite communauté qui s’est constituée dans une zone rurale, à renouer avec des techniques rudimentaires d’enquête.
Rachel, ancienne flic, est désignée Gardienne du Talion.
Justice doit être rendue, mais de quelle justice parle-t-on dans un monde bouleversé par un désastre climatique, en quête de repères ?
Un polar âpre à l’ère du post-effondrement.
Philéas

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