La Peur : Le livre de Stefan Zweig

Numérique

Robert Laffont

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" La lutte passionnelle d'une femme pour sa liberté sur un mode de quasi-thriller psychologique. " Jörg Stickan

Par envie de se divertir, Irene Wagner, épouse d'un riche avocat, entretient une liaison avec un musicien, jusqu'au jour où, en sortant de chez son amant, elle est bousculée par une femme qui la reconnaît. Dès lors, Irene vit dans la peur. Victime d'un odieux chantage, elle paie des sommes de plus en plus folles, sans savoir comment expliquer ces dépenses inconsidérées à son mari, et perd tout ce qui fait son existence.
Par souci à la fois de modernisation et de fidélité à la version originale, la collection " Pavillons Poche " publie ce chef-d'oeuvre de Stefan Zweig dans une traduction inédite en poche.

De (auteur) : Stefan Zweig
Traduit par : Jörg Stickan, Sacha Zieberfarb

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Expérience de lecture

Avis Babelio

Rinrin_electro

5.00 sur 5 étoiles

• Il y a 1 mois

Connaissez-vous la peur véritable ? Celle qui empêche de dormir, qui ronge la vie, obsède inlassablement. Mais cette peur peut aussi, malgré les déboires qu'elle entraîne, être une attraction, une preuve de vie. Pour Irene, la Peur qui l'envahit est paradoxalement un déclencheur de vie. J'ai été vraiment transportée aux tripes par ce récit d'une grande tension. Stefan ZWEIG aura agi en maître : exploration de la Peur, critique raffinée de la bourgeoisie ennuyée, éclat de vie, et chute absolument brutale qui change complètement la compréhension de l'histoire. J'en suis encore scotchée !

fulmar

5.00 sur 5 étoiles

• Il y a 3 mois

« Il était délicieux l'air de cette radieuse matinée d'avril, encore tout chargé de pluie et déjà tout ensoleillé. Il avait la saveur d'un fondant, il était doux, frais, humide et brillant. C'était un air de pur printemps, un ozone sans mélange. On s'étonnait de respirer une odeur enivrante de prés en fleur et d'air salin. Ce ravissant miracle était l'oeuvre d'une averse, de l'une de ces capricieuses ondées d'avril dont use volontiers comme carte de visite un printemps retardataire ». C'était un miracle, comme une résurrection, le retour de sensations disparues au coeur de l'hiver, qui réapparaissaient avec ce regain de vitalité. Oui, mais Pâ-ques. « C'est alors que creva ce nuage noir tout gorgé d'eau qui faisait la course avec notre locomotive. Un petit éclair blanc donna le signal; aussitôt, dans un roulement de tambour, et tombant en trombes, la pluie mitrailla notre train. Gravement atteintes, les vitres pleuraient sous le crépitement meurtrier des humides projectiles. On ne voyait plus rien, on n'entendait plus que le grondement irrité de l'averse sur le verre et l'acier, et, comme une bête pourchassée, la locomotive filait sur les rails étincelants pour échapper à l'orage ». Cette description d'un paysage changeant est le début de la nouvelle « Révélation inattendue d'un métier », l'une des six composant le recueil intitulé « La peur ». Peur de perdre, peur de ne plus savoir, peur d'oublier, peur du souvenir, peur de l'avenir, scruter l'instant présent pour le garder en mémoire, afin de pouvoir le faire ressurgir lorsque le moment sera propice, un petit éclair blanc, un flash qui illumine la noirceur des sentiments, ce curieux mélange fait de lumière et d'obscurité, quand les souvenirs s'estompent dangereusement au point de ne plus savoir pendant un court laps de temps si les images emmagasinées qui reviennent soudainement sont le fruit d'une mémoire encore fonctionnelle ou de l'imagination débridée d'un esprit ravageur et inconstant. Ce matin, une brume ouateuse estompe les formes lumineuses d'hier. Tout semble figé, pas de vent, presque pas de sons, juste quelques chants d'oiseaux qui s'égosillent, car il faut bien marquer l'arrivée du printemps. Une bizarre sensation d'engourdissement envahit le corps à la vue de cet étrange tableau voilé, comme si les événements de la veille s'étaient dissipés dans cette atmosphère dénaturée. « J'étais donc assis en ce jour béni d'avril dans mon léger fauteuil au bord du fleuve humain, attendant je ne sais quoi. Tout d'abord la rue ne m'apporta rien, et au bout d'une demi-heure d'attente ce tourbillonnement de la foule me fatigua la vue, au point que je ne percevais plus nettement aucun détail. Je commençais à ne plus voir les visages dans ce flot humain que le boulevard chassait devant moi ; ce n'était plus qu'une masse ondoyante, confuse et bariolée de casquettes, de chapeaux et de képis, d'ovales mal peints aux regards inquiets, hâtifs ou engageants, écoeurantes rinçures d'un fleuve qui coulait toujours plus terne et plus gris au fur et à mesure que se lassait mon regard. Je fus bientôt épuisé, comme on l'est après la vue d'un film aux images troubles et sautillantes ». Parfois le plein semble aussi vide que le rien. Au point de ne plus distinguer le vrai du faux, de ne plus savoir faire la part des choses, comme Stefan Zweig l'a exprimé dans une autre nouvelle, « La Confusion des sentiments ». Pourtant, là, je me souviens d'hier, de la lumière douce et rasante qui éclairait le rose du prunus et le blanc du bigarreautier. de la douceur apaisante des bugles mauves qui parsèment la pelouse, des tulipes éclatantes qui éclaboussent le verdoyant feuillage des pousses surgies après quelques crachins revigorants. Le charme suranné de la campagne bucolique contraste avec la violence de l'agitation de la ville où trop de sensations nuisent à l'équilibre des sentiments. Le pickpocket peut agir sans crainte, difficile de saisir ses gestes souples et silencieux, sa dextérité semble invisible dans le brouhaha urbain. « Quelqu'un, parmi cette foule de curieux qui ne cessent d'encombrer le trottoir, ne l'espionne-t-il pas ? Il doit prendre constamment garde à tout cela, et aussi à ce que le reflet de sa main dans une vitrine qu'il n'aurait pas tout d'abord remarquée ne vienne le trahir. Et puis personne ne surveille-t-il son manège de l'intérieur d'une boutique ou du haut d'une fenêtre » ? La peur domine, elle est présente à tous moments, insidieuse et maléfique. Même lorsque le paysage printanier éclate au grand jour, elle surgit comme une ombre qui apparaît soudainement quand un nuage malicieux cache la lumière du soleil. C'est alors que reviennent les regrets d'antan, les souffrances de jadis, comme des zones d'ombre enfouies au plus profond de la mémoire qui refont surface et prennent l'air vivifiant entre deux vagues déferlantes. « La vie était encore pleine d'attraits. C'était une de ces journées de pur printemps, comme il en éclate parfois au plein coeur de l'hiver : une journée avec un ciel bleuissant à l'infini, dont l'ample élévation donnait l'impression que l'on pouvait enfin respirer après toutes les journées enténébrées de l'hiver. L'air était doux, avec une touche de soleil au-dessus des maisons. La force impétueuse du vent qui pourchassait les nuages blancs dans le ciel semblait s'être communiquée quelque peu à l'allure des gens, qui marchaient avec plus d'allant et de légèreté que pendant toutes les journées lugubres et crépusculaires de l'hiver ». Ce passage sort de « La peur », la nouvelle qui débute et domine le recueil. La femme adultère, adulée qui se terre, souffre en silence et pousse un cri qui reste à l'intérieur, son visage « Munchien » plein d'effroi va se métamorphoser comme la nature au printemps. « Elle avait encore un peu mal, au-dedans, mais c'était une souffrance pleine de promesses, cuisante et plaisante à la fois, comme des blessures qui brûlent avant de cicatriser pour toujours ». La nouvelle suivante reprend le thème de la femme qui se confond avec la nature changeante, femme et nature, deux mots féminins charmeurs et interchangeables qui allient la douceur et l'imprévisibilité. « Dès l'aube, le soleil, jaune et morne comme l'oeil d'un fiévreux, envoyait du fond du ciel vide ses rayons accablants sur le paysage éteint, puis, au fil des heures, une vapeur blanchâtre s'élevait peu à peu comme d'un immense chaudron en pleine ébullition et envahissait la vallée. Du matin au soir le soleil dardait ses rayons brûlants et son oeil jaune et angoissant avait quelque chose de la fixité du regard d'un fou. J'aurais voulu sortir et aller m'étendre dans la forêt, où des ombres bleues tremblaient entre les arbres, rien que pour échapper à ce regard jaune et fixe du soleil, mais l'effort qu'eussent exigé ces quelques pas était trop grand pour moi ». Nous sommes ici dans « La femme et le paysage », encore une description où l'ombre et la lumière se chevauchent et rendent l'ambiance à la fois pesante et dévorante. « Tout à coup, il me sembla qu'un souffle léger, très léger, passait sur la nature, comme si un soupir ardent et nostalgique fût sorti de quelque part. Toujours recroquevillé dans mon coin d'ombre, je n'avais pas encore senti son approche, mais les arbres, là-bas, sur le versant d'en face, semblaient avoir deviné une présence étrange, car soudain ils se mirent à osciller très légèrement, comme s'ils se penchaient l'un vers l'autre pour se parler. Les ombres qui les séparaient, devenues vivantes, commencèrent à remuer et à s'agiter ; tout à coup s'éleva dans le lointain une rumeur profonde et vibrante ». Une rencontre va avoir lieu entre un homme et une jeune fille au cours d'une nuit où la pluie va enfin faire son apparition et gommer la sécheresse dévastatrice. Cette rencontre sera des plus brèves autant que des plus curieuses car cette jeune fille va apparaître dans la chambre de l'homme sans s'en rendre compte, elle est somnambule. le narrateur va croire à un élan du coeur de la jeune femme dû pour une grande partie à la chaleur régnante et assoiffée de baisers. L'orage éclate, la jeune fille reprend ses esprits et au matin elle n'a plus aucun souvenir de cette nuit sauf peut-être une légère sensation que le jeune homme croit percevoir.  Un paysage desséché et assoiffé et une jeune fille qui représente elle-même cette soif par une demande impatiente quasi hystérique de baisers, sont-ils tous deux liés ? Ou représentent-ils au début dans leur calme apparent une lassitude qui explose l'un par la venue de la pluie et l'autre par les baisers ? Quoi qu'il en soit la nature de la jeune femme est, je pense, liée à la nature elle-même puisqu'elle subit cette pesante chaleur et sécheresse tout comme le paysage environnant. C'est la plus étrange et « fantastique » des nouvelles, celle où l'auteur donne toute sa puissance évocatrice. « Le ciel était tout à fait vide à présent, mais il n'était pas pur. Un voile verdâtre couvrait les étoiles, et la lune montante brillait de l'éclat sinistre d'un oeil de chat. Là-haut tout était blafard, ironique et menaçant, tandis qu ‘en bas, bien en -dessous de cette sphère incertaine, la nuit au souffle tourmenté et voluptueux d'une femme déçue tombait, sombre, phosphorescente comme une mer tropicale ». Je ressens les effluves et les vapeurs de ce moment magique, la lassitude me gagne et un besoin de repos se fait sentir en moi. Mes nerfs endoloris ne demandent qu'à s'apaiser. Dormir avec la nature et se réveiller avec elle, c'est le cri de tout mon être ! Soudain, la sérénité semble s'installer. « L'horizon déployait sa vaste voûte bleue. Sans désirs, comme des étrangers, le ciel et le paysage se regardaient ». Envie de terminer cette exploration de l'univers de Zweig par  "La collection invisible". Un vieil homme devenu aveugle possède un nombre impressionnant d'oeuvres d'art qu'il connaît à la perfection. Il s'empresse de les faire admirer à un antiquaire venu les estimer. le vieillard ne sait pas que sa collection a disparu des murs de son habitation. Mais ses souvenirs sont intacts. Il va faire la description de tous les tableaux en insistant sur les détails invisibles au profane. « Avec une précaution infinie, comme s'il touchait un objet fragile, il tira du carton un passe-partout qui encadrait une feuille de papier vide et jaunie. Prudemment, du bout des doigts, il la souleva devant ses yeux éteints et la contempla avec enthousiasme, sans la voir. Tout son visage exprimait l'extase magique de l'admiration. Tout à coup, était-ce le reflet du papier ou une lumière intérieure, ses pupilles figées et mortes s'éclairèrent d'une lueur divinatrice ». Au moment où j'écris ces lignes, j'apprends que le pape n'est plus qu'un souvenir. le regain de vitalité printanier m'a permis de stopper les cris et de reprendre l'écrit. Oui, mais Pâ-ques… Il était une foi, mais la peur, elle est toujours là. La peur, pas l'heure, oui mais, pâleur quand même... Stefan m'a pris par la main, mais j'entends Benjamin... « Il y a toujours ces nuits où la mémoire ne flanche que sur quelques détails sans la moindre importance, mais au fil de ces films l'espoir se fait la paire et plus les nuits défilent, plus le coeur est de pierre, plus la mémoire me perd ».

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CherryBooks

4.50 sur 5 étoiles

• Il y a 8 mois

Recueil de nouvelles dans des ambiances très différentes. Toujours la sublime plume de Zweig qui souligne avec pureté chaques détails. Je suis toujours enchantée par sa façon de décrire les paysages et les gens. Du beau, du beau, du beau ! Ça se dévore en un rien de temps. La nouvelle "la collection invisible" m'a particulièrement touchée.

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Fiche technique du livre

  • Genres
    Classiques et Littérature , Littérature Classique
  • EAN
    9782221219300
  • Collection ou Série
    Pavillons Poche
  • Format
    Livre numérique
  • DRM
    Filigrame numérique

L'auteur

Stefan Zweig

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