N'éteins pas la lumière : Le livre de Bernard Minier

Dans "N’éteins pas la lumière", Bernard Minier signe un roman policier dense et envoûtant, où la tension monte page après page comme un crescendo d’opéra. J’ai été happée dès les premières lignes par cette intrigue qui mêle subtilement suspense psychologique, atmosphère glaciale et références musicales fascinantes. L’opéra, omniprésent, confère au récit une dimension presque théâtrale, un jeu d’échos entre beauté et terreur, entre le chant et le cri. J’ai retrouvé avec plaisir le commandant Servaz, figure désormais familière de l’univers de Minier. Pourtant, au fil de ma lecture, j’ai senti poindre une certaine lassitude face à cette éternelle chasse à l’homme menée contre Julian Hirtmann. Ce duel obsédant, parfois un peu brouillon, semble tourner en boucle, comme une partition que l’auteur rejoue encore et encore sans apporter de réelle variation. Mais malgré cette impression de déjà-vu, la puissance narrative et la maîtrise du rythme m’ont tenue en haleine jusqu’à la dernière page. La plume de Bernard Minier reste remarquable : précise, immersive, d’une efficacité redoutable. Il excelle dans l’art de créer des ambiances où la beauté côtoie la noirceur, où chaque silence a le poids d’un secret. N’éteins pas la lumière est une lecture intense, un roman qui t’emporte dans ses ténèbres tout en te laissant, paradoxalement, subjugué·e par sa lumière.

Il y a une originalité dans cet opus mettant en scène le commandant Servaz qui consiste dans le fait deux histoires parallèles y sont développées, l'une animée par le héros de la série, l'autre par une héroïne temporaire dont les actions ne vont pas manquer de piquant jusqu'au terme du volume. Une autre originalité intéressante réside dans le fait d'une belle analyse des comportements des pervers narcissiques et des schizophrènes, l'ensemble insérée dans une expédition spatiale internationale à laquelle vont participer deux protagonistes du livre. Alors, bien sûr, c'est long, on pourrait alléger quelque peu sans doute mais, finalement, une fois que l'on est bien installé dans les différentes intrigues, on tourne les pages en acceptant les digressions variées, les analyses toujours intéressantes et une variété de personnages qui me semblent faire la richesse d'un bon polar, ceci même s'il faut quelquefois revenir un peu en arrière pour se recaler dans la globalité de l'histoire. Celle-ci se déroule exclusivement à Toulouse -- hormis la partie spatiale -- et j'aime bien suivre Servaz et ses partenaires dans les ruelles de la ville rose, retrouver l'ambiance de la place Wilson, du Capitole et même de la cité de la Reynerie. Le canal du Midi avec son eau verte chantée par Nougaro, la Garonne, une petite escapade très brève vers le lac de Saint-Ferréol, autant de lieux qui me parlent beaucoup, lieux célèbres ou confidentiels d'une ville à laquelle je suis très attaché. Le suspense est au rendez-vous, on peut bien sûr entrevoir des parties du dénouement, mais Bernard Minier a toujours une cartouche surprenante en réserve à utiliser dans les dernières pages. Encore une fois, il a installé l'intrigue en hiver avec une quantité de neige inhabituelle à Toulouse, des orages, de la pluie en quantité, donc de la belle boue dans les forêts et des lieux de choix pour faire disparaître différents corps. Quelques lecteurs peuvent décrier Minier, lui préférant Chattam ou Giebel, c'est affaire de goût, pour ma part j'admire toujours son travail de documentation soigné, ici avec l'espace et l'opéra qui revient régulièrement au fil des pages au point de susciter l'envie d'écouter à nouveau les oeuvres wagnériennes et les tragédies amoureuses des maîtres et de leurs interprètes.

J'avais déjà beaucoup apprécié les deux premiers tomes mais ce troisième tome est encore mieux ! Bernard Minier se renouvelle de tome en tome. On suit l'évolution de Servaz avec toujours Hirtmann en toile de fond. Je passe toujours un agréable moment, je vous conseille cette saga !

Complètement paranoïaque J'avais beaucoup apprécié le premier livre de Bernard Minier "Glacé" qui avait donné un nouveau souffle dans le genre du thriller à la française. Après un deuxième tome intéressant mais à mon avis peut-être moins percutant, Bernard Minier nous offre cette fois-ci une œuvre totalement paranoïaque. On retrouve avec plaisir le commandant Servaz toujours aussi solitaire et désabusé, "interné" dans un établissement de repos pour policiers dépressifs et alcooliques à Toulouse dont le rôle est beaucoup moins important dans cette troisième enquête. L'intrigue est elle d'une subtilité délicieuse et pernicieuse et je me suis souvent interrogé lors de la lecture du roman si une telle histoire pouvait m'arriver. Le roman débute lentement par une lettre anonyme à la jeune Christine chroniqueuse radiophonique la prévenant d'un suicide qui pourrait être commis à la veille du réveillon de noël, mais cette lettre totalement anodine va provoquer dans le vie de cette jeune femme un terrible tourbillon d’événements qui vont bouleverser son existence. Je n'ai pas lâché le livre jusqu'à la fin pendant trois jours car les rebondissement s'enchaînent sans sembler artificiels. J'ai été pris par ce maelström en ne voyant aucune échappatoire, c'est terrifiant et passionnant. Vivement un quatrième tome.