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Par Philéas, publié le 01/12/2022

"Le Meilleur des mondes", adapté pour la toute première fois en roman graphique !

Fred Fordham a choisi d’adapter en bande dessinée Le Meilleur des mondes, le chef d’œuvre d’Aldous Huxley publié en 1932. Cette œuvre du siècle dernier traite de thèmes profonds tels que l'hédonisme, l'humanité, la technologie…

Ce classique de la littérature du XXe siècle est un reflet et un avertissement pour l'époque à laquelle il a été écrit, mais reste terriblement pertinent aujourd'hui.

 

1) Vous souvenez-vous de la première fois où vous avez lu Le Meilleur des Mondes ?

J'avais une vingtaine d'années. Je me souviens avoir trouvé que c'était un mélange passionnant de thèmes : une part d’anticipation, de conte philosophique et de pure fantaisy.

 

2) Pourquoi l'adapter en bande dessinée ? Avez-vous rencontré des difficultés pour définir graphiquement les personnages principaux ?

C'est mon éditeur américain qui me l'a demandé après avoir terminé Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur. C'était en 2018 ou 2019. J'ai mis du temps à me lancer et à décider du style et de l'approche. J'ai surtout essayé de faire correspondre les personnages aux descriptions du livre original. Il y avait une exception : je voulais faire du personnage masculin Mond une femme dans cette adaptation, mais une discussion avec l'éditeur américain et les ayants droit a permis de conclure qu'il était probablement préférable de s'en tenir aux personnages tels qu’Huxley les avait écrits.

 

3) Ce livre est très moderne pour les années 30. Quels sont les thèmes les plus importants pour vous ?

Il y a beaucoup de thèmes intéressants, mais je pense que le plus important et le plus prémonitoire est l'idée que les gens peuvent être contrôlés et asservis par le confort. C'est un style d'autoritarisme opposé à celui du 1984 d'Orwell (décrit comme "une botte piétinant un visage humain - pour toujours"). Huxley suggère que les gens peuvent rester dociles si on les nourrit de distractions et de plaisirs constants. Ils prennent ce bonheur superficiel pour un véritable épanouissement et perdent ainsi la curiosité nécessaire à une véritable liberté. C'est un point de vue intéressant sur la dystopie. Et bien sûr, il y a le contrepoint de John "le Sauvage" qui représente les dangers de l'extrême opposé, la répression de tout plaisir dans la poursuite de quelque chose de plus "profond".

J'aime les fictions dystopiques. Je pense qu’Huxley et Orwell sont de bons compagnons : des visions très différentes, chacune perspicace à sa manière.

 

4) Ce livre a été écrit il y a près d'un siècle, mais il est encore très actuel. Savez-vous comment Aldous Huxley a imaginé ce monde ? Comment moderniser un tel récit ?

Je ne suis pas à la place d’Huxley, mais je suppose que sa vision cauchemardesque d'une dystopie "heureuse" était simplement issue de ses propres observations sur la façon dont les gens ont tendance à se comporter : les humains ont toujours été capables de vivre des expériences très profondes, bonnes ou mauvaises, mais ils sont aussi toujours attirés par le confort et le plaisir simple. Certains aspects de la culture moderne, en particulier en ligne, nous encouragent à rechercher de brefs coups de dopamine (likes, partages, etc.) plutôt que des formes d'épanouissement plus stimulantes. C'est la raison pour laquelle j'ai utilisé l'iconographie des emojis et des réseaux sociaux dans les dessins.

 

5) Quelle est votre technique de dessin ?

Je dessine et mets en couleurs numériquement maintenant. Je suis encore en train d’apprendre à travailler avec les outils informatiques, car je viens de la peinture à l'huile et j'apprends en autodidacte. Cela m'a pris un certain temps pour m'y habituer, mais la sensibilité du stylet et du logiciel est devenue si bonne que cela semble tout à fait naturel. J’utilise toujours mes aquarelles pour les mixer dans les illustrations définitives, pour éviter un aspect trop artificiel. C'est juste un goût personnel.

 

6) Quels sont vos auteurs de bande dessinée préférés ?

Il y en a beaucoup ! Marjane Sartrapi est la première autrice de BD que j'ai lue et celle qui m'a fait m'intéresser à ce média. J'ai récemment découvert Benjamin Flao dont je trouve le travail assez incroyable, à la fois en tant qu'artiste et en tant que conteur. J'aime aussi Moebius, Frank Quitely, Nagabe, Posy Simmonds, Bastien Vivès, Glyn Dillon, Hugo Pratt, Hayao Miyazaki, Jeff Smith, Katsuhiro Otomo... La liste est longue !

 

7) Quelle est leur influence sur votre travail ?

Les artistes que j'aime lire m'influencent de différentes manières, je pense… Par exemple, mon style de dessin n'a rien à voir avec celui de Bastien Vivès, mais c’est un tel maître du rythme et de l'expression qu'on peut apprendre beaucoup en étudiant son travail. D'un point de vue graphique, j'essaie de faire ce qui fonctionne le mieux pour l'histoire que j'essaie de raconter. Pour ce livre, je voulais que tout soit immaculé et anatomiquement juste, propre, et j'ai beaucoup regardé Moebius et Frank Quitely. J'apprends sur le tas, à la fois sur le côté technique, l'utilisation du logiciel comme je l'ai mentionné, mais aussi sur le fonctionnement de la bande dessinée.

 

Le meilleur des mondes
Publié pour la première fois en 1932, Le Meilleur des Mondes est l’une des œuvres les plus vénérées et les plus profondes de la littérature du XXe siècle. Abordant les thèmes de l’hédonisme et du contrôle, de l’humanité, de la technologie et de l’influence, le classique d’Aldous Huxley est un reflet et un avertissement pour l’époque à laquelle il a été écrit, mais reste terriblement pertinent aujourd’hui.
L’adaptation revisitée de cette récit puissant et stimulant par Fred Fordham révèle une identité visuelle inédite, la présentant à une nouvelle génération de lecteurs modernes d’une manière originale et convaincante.

 

Biographie :

Fred Fordham est né en 1985 à Londres et réside dans le nord de la City. Il débute le dessin très tôt, d’abord en reproduisant principalement les personnages préférés de son enfance. Le dessin et la peinture ne sont alors que des hobbies.

En 2008, il est diplômé en politique et philosophie de l’université de Sussex. C’est à cette période qu’il découvre la bande dessinée en lisant Persépolis de Marjane Satrapi.

Philéas