Le garde du coeur - Nouvelle édition : Le livre de Françoise Sagan

Un coup de cœur pour le Garde du cœur ! La lecture du Garde du cœur de Sagan m’a procuré le même effet que la respiration d’un grand bol d’air frais. J’ai été séduite par la vivacité d’esprit et la légèreté de ton de l’auteur, des ingrédients qui semblent manquer cruellement à la littérature en ce moment. Question d’époque, sûrement… L’histoire se déroule probablement au milieu des années 1960. Dorothy Seymour, 45 ans, belle et libre de ses choix, prête ses talents de scénariste à une maison de production cinématographique d’Hollywood. Elle a pour amant Paul Brett qui représente les intérêts de la même chapelle. Un soir, alors qu’ils longent le bord de mer, à Santa Monica, à bord de la Jaguar de Paul, un jeune homme se jette sous les roues du véhicule. Il est blessé mais vivant. Dorothy l’installe chez elle, le soigne, sous le regard étonné mais bienveillant de Paul. Une relation amoureuse ambiguë germe immanquablement entre Dorothy et l’étrange Lewis. Le trio amoureux si cher à Sagan est en place. Dorothy prend plaisir à s’occuper du joli blondinet, alors même qu’elle le trouve trop lisse, trop mince, trop parfait — « il me faisait penser à cette race élue dont parle Proust : ses cheveux avaient l’air de plumes, sa peau d’un tissu ». Tout en pansant ses plaies à lui, elle lui confie ses peines de cœur à elle, notamment l’échec de son second mariage avec Franck Saylor, il l’a quittée pour une actrice jeune, belle et talentueuse, elle a souffert le martyr pendant près d’un an. Quelques jours plus tard, on apprend le décès de Franck. Et de confidence en confidence, des morts mystérieuses se succèdent sous les sunlights d’Hollywood… Cette fable délicieusement amorale m’a comblée de joie. Elle m’a emporté loin de mon quotidien, de la réalité qui m’entoure. La plume de Sagan est drôle, enlevée, pétillante. Je me suis amusée et j’ai aimé ça.

Âgée de quarante-cinq ans, Dorothy travaille à Hollywood. Son amant Paul aimerait l’épouser. Un soir, en rentrant, ils manquent de percuter un jeune homme, Lewis, que Dorothy accueille chez elle pour sa convalescence. Lewis va s’attacher à Dorothy et la protéger… envers et contre tout. Dorothy est le personnage type de Sagan : une femme libre, plutôt alcoolique, et surtout extrêmement désabusée. Les hommes sont beaux, la vie est nonchalante et certains personnages sont tout simplement exécrables. J’ai adoré cette histoire, qui est un peu plus tordue que d’habitude, et qui présente un petit côté amoral intéressant.

Un petit roman bien sympathique de la part de Sagan, publié en 1968 (Google se trompe à ce sujet). Une bluette sans ambitions majeures autre que de fabriquer une histoire divertissante avec ces deux personnages hautement rocambolesques avec pour cadre la Californie et Hollywood. Sagan ne propose rien d'autre qu'un livre léger et humoristique. En effet plus ça avance, plus on s'attend au prochain personnage à vivre une mort tragique, plus on s'amuse en fin de compte avec la narratrice bien obligée de jouer le jeu de son jeune ami étrange qui ne supporte pas les gens qui manquent de respect à cette femme qui lui a sauvé la vie. On a droit à quelques lignes bien drôles sur la morale perdue du personnage principale qui me fait croire que Sagan était tentée par la comédie (mais pas entièrement). On a surtout dans ce livre un final plutôt impressionnant pour un si léger texte avec la tempête Anna qui dévaste tout et provoque une nuit inoubliable entre la narratrice et Lewis. Où la logique du texte finalement demande un accomplissement de la part de Lewis qui n'ira pas jusqu'au bout cette fois-ci. Ce passage prouve que Sagan avait la maîtrise totale de l'écriture de son texte et de ses personnages.