Le meilleur des mondes : Le livre de Aldous Huxley, Fred Fordham, Fred Fordham

J'ai vu passer le titre Le Meilleur des Mondes des dizaines de fois lors de mes visites en librairie, mais ne l'ai jamais ouvert. En bibliothèque, je suis tombée sur cette adaptation graphique et je me suis dit que je pouvais enfin découvrir cette œuvre toujours adorée de son public tout en découvrant un dessinateur. D'une pierre deux coups et le résultat est satisfaisant : entre hédonisme, sécurité et contrôle, le monde après Ford est fabriqué de A à Z et ne laisse aucune chance au moindre écart. Tout le monde est conditionné pour aimer ce monde. Et cette vision se bouscule quand Bernard part dans les terres sauvages du Nouveau-Mexique avec Lenina pour rencontrer les sauvages, des humains n'ayant pas voulu rentrer dans les cases aseptisées et conditionnées de la civilisation. Il y rencontre Linda, une ancienne civilisée s'étant perdue lors d'une expédition avec l'un de ses compagnons, chef direct de Bernard. Cette dernière a eu un fils, contre sa volonté, et lui a parlé d'où elle venait. John est une sorte de mélange civilisé et sauvage, il sait lire et raisonner tout en invoquant la liberté d'avoir des émotions douloureuses, de subir la vie au lieu de juste la traverser bêtement. Ramener John et Linda à Londres promet d'être très intéressant pour Bernard, qui s'ennuyait pas mal... Et ça l'est. Les cases de Fred Fordham sont toutes efficaces et gracieuses. Avec une brutalité artistique et des effets quasiment cinématographiques, elles appuient les scènes stratégiques du récit, ce qui aide à la lecture tout en intensifiant les propos tenus par chacun. Les personnages se ressemblent presque tous et on voit vite la différence quand Linda revient à Londres avec John, qui refuse de s'adapter et reste ancré dans les textes de Shakespeare. C'est toute une discussion philosophique et artistique que Le Meilleur des Mondes, qui fonctionne largement encore aujourd'hui : faciliter la vie et ne vivre que dans le plaisir, mais à quel prix ?

Lu au lycée, il y a peu (1997?), je me rends compte à la lecture que mes souvenirs de ce livre ne sont pas aussi bons que je pensais... J'avoue m'être même parfois mélangé avec 1984, honte à moi ! Même si le message de l'œuvre originelle est toujours aussi fort, j'avoue que la BD n'a pas eu le même impact sur moi que le livre la première fois. Bienvenue dans un futur où tout le monde est heureux, beau, conditionné… et surtout, parfaitement docile. Le sexe est libre, la pensée captive, et les bébés sortent d’usines comme des smartphones. Une dystopie glaçante où le bonheur est obligatoire, la culture suspecte, et le libre arbitre un virus éradiqué depuis longtemps. Une satire visionnaire — et terriblement actuelle — où l’on comprend vite que le vrai cauchemar, ce n’est pas la souffrance… c’est le confort sans conscience.