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Par Robert Laffont, publié le 23/10/2022

5 questions à Chloé Chevalier

Rencontre avec Chloé Chevalier, l'autrice de "La Sans-Étoiles", le premier tome de la duologie "Loin des Îles Mauves". 

Avec "La Sans-Étoiles", Chloé Chevalier nous offre une réflexion subtile et habile sur des thèmes aussi essentiels que le genre avec le système des "Héros", la colonisation, la protection de la nature et la lutte des faibles contre les puissants.

1. Parlez-nous de votre roman… À quoi peut-on s'attendre et comment vous est venue l'idée ?

À la première phase d'un long voyage, d'une terre à l'autre, d'une vie à l'autre, d'un âge à l'autre – et première phase n'implique pas qu'il s'agisse d'un lent tome d'exposition, bien au contraire, le rythme est assez intense. Comme dans tout long voyage, les décors défilent, les ambiances, les gens, il y a des escales imprévues, des pannes, des accélérations soudaines... et on trouve rarement au bout de la route ce que l'on était parti chercher.

L'idée est ancienne, quasiment dix ans, puisque j'avais déjà pris quelques notes en vue de cette histoire (qui devait à l'époque n'être qu'une nouvelle) pendant que j'écrivais le tome 2 de ma précédente série de fantasy, Récits du Demi-Loup. On y trouve d'ailleurs une allusion aux Iles Mauves et à leurs pollens ! Les Récits du Demi-Loup se déroulent dans le même univers que Loin des Iles Mauves, mais très loin dans l'espace et le temps, et sans lien narratif... sauf en ce qui concerne un peuple très particulier que les lecteurs des deux sagas reconnaîtront aisément.

Entretemps, je suis partie vivre quelques années en Suède, et les paysages et la nature scandinaves ont nourri l'écriture de ce nouveau cycle. Les côtes granitiques de l'archipel de Göteborg, où je vivais, les lumières du nord, les hivers presque sans jour et les étés presque sans nuit, qui créent une vie à deux vitesses. Mais aussi les villes portuaires colorées du bord de la Baltique, qu'il s'agisse de Stockholm ou, si on traverse la mer, de Gdańsk. Les Iles Mauves se sont aussi nourries d'autres voyages en Pologne, notamment aux mines de sel de Wieliczka, près de Cracovie, immenses et spectaculaires. D'une manière générale, quand j'écris j'aime me projeter dans des lieux que j'ai connu, parcouru, senti – même si ensuite la fiction les recrée – et c'est encore plus vrai avec Loin des Iles Mauves.

2. Et vos personnages principaux, qui sont-ils ?

Ils sont un groupe de huit jeunes gens de dix-sept ans (ou presque), et tous (ou presque) ont grandi en vase clos sur une minuscule île, Aryl, dans un archipel perdu loin dans le nord, les Iles Mauves. L'isolement, le manque de ressources et un passé violent divise les deux populations de l'archipel et cette réunion de membres des deux peuples en vue d'une grande expédition constitue une première violation des règles âpres d'Aryl.

Présenter ici les huit membres du groupe prendrait trop de temps, mais deux personnalités s'en distinguent – et ce malgré leurs efforts pour, justement, passer inaperçus et être laissés tranquilles. Manik, le pupille du grand-Leif d'Aryl, marin, ombrageux à la limite du brutal, mais aussi étrangement attentif à ses comparses. Et bien sûr Yvanel, narratrice et personnage principal. Du genre très taciturne, elle préfère observer – les autres, le monde – que parler, se montre plutôt timide bien que jamais timorée, déteste être mise en avant et apprécie sa solitude. Souffrant d'un mal qui revient la tourmenter chaque mois, Yvanel est aussi une grande nageuse et une fine connaisseuse de la faune et de la flore de son archipel.

3. Est-ce plus facile d’écrire un roman pour ados ou un roman pour adultes ? Quelles sont les principales difficultés auxquelles vous avez fait face pendant l’écriture ?

Honnêtement, je n'ai pas eu l'impression qu'il y avait une réelle différence entre les deux. En tout cas je ne me suis posé aucune contrainte particulière en terme de style, de contenu, etc... à part celle de mettre en scène des personnages qui avaient globalement l'âge des lecteurs, pour faciliter une identification immédiate – et de cette contrainte-là découlent nécessairement des enjeux, des préoccupations différentes de si l'histoire avait été celle, par exemple, d'un groupe de quadragénaires. Il y a bien sûr un petit exercice de gymnastique mentale pour se replacer quelques années en arrière, quand on avait l'âge des personnages, et ainsi retrouver des sensations, comment on voyait le monde, les relations aux autres – mais au fond il y a toujours un peu de cette gymnastique pour épouser le point de vue et la façon de penser et d'agir d'un personnage parfois très différent de soi, afin de le rendre le plus vrai possible. En somme, les ados sont des humains comme les autres, pas la peine de leur concocter une écriture spéciale !

Une difficulté d'écriture ? Toutes les scènes ayant trait à la navigation, alors que je n'ai jamais posé les pieds sur un bateau ! Elles m'ont demandé pas mal de recherche et d'accompagnement, et souvent quelques réécritures, avant d'atteindre un degré de réalisme – je l'espère – satisfaisant. Ça, et composer une intrigue de contestation sociale dans une mine sans plagier aveuglément Germinal de Zola, qui est un roman que j'aime énormément et qui avait très, très envie de laisser son empreinte sur ce livre !

4. Qu’espérez-vous que les lecteurs retiennent de votre livre ?

Qu'ils referment le livre en ayant la sensation d'avoir réellement visité les lieux traversés, et d'avoir réellement fait connaissance les personnages, dont ils n'attendront plus que de recevoir davantage de nouvelles !

5. La Sans-Étoiles est le premier tome d’une duologie. Que nous réserve la suite des aventures d'Yvanel ?

Difficile de répondre à cette question sans spoiler le tome 1 ! Dans le tome 2, commerce oblige, on voyagera beaucoup entre les Iles Mauves et le continent, et on verra les personnalités de chacun des protagonistes s'affirmer, et donc leurs affinités et leurs préoccupations évoluer, dans des directions qui n'étaient pas du tout celles imaginées par la joyeuse bande en quittant leur île natale. On verra Yvanel faire des choix de vie à même de tout particulièrement l'éloigner de ses camarades... quand bien-même elle aurait effectué lesdits choix pour eux.

À priori, le rythme de la narration sera assez différent : La Sans-Etoiles est un continuum, la fameuse première phase du voyage évoquée plus haut, se ramasse sur six mois, mais Le Sans-Soleil comportera beaucoup plus d'ellipses, et se déroulera sur une plus grande période de temps – potentiellement jusqu'aux vingt ans des personnages.

Loin des îles mauves - Livre I : La Sans-Étoiles
Yvanel est un Héros. Née femme, elle doit, comme ses congénères du Peuple des Bruyères, bander ses seins et cacher son identité aux yeux des Leifa – le peuple dominant des Îles Mauves.
Mais au-delà des querelles qui opposent ces deux peuples depuis la nuit des temps, un danger menace les îles de famine : l’Empire et ses navires qui s’accaparent les baleines.
Bravant les lois de leur archipel, Yvanel et cinq de ses compagnons embarquent à bord d’un voilier pour un périple à haut risque. Leur mission ? Négocier leur avenir.

« Une fantasy belle et âpre, où le souffle iodé de la grande aventure se mêle à une méditation poétique sur l’identité, la civilisation et le progrès. »
Victor Dixen, auteur des sagas Phobos et Vampyria

Robert Laffont

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