Comment, bien à l'abri des regards derrière les murs du Palais Royal, le Conseil d'État produit-il du drot ? Selon quelle légitimité, les conseillers d'État parviennent-ils à prendre une décision juste, à bien juger ? Répondre à ces questions, en moins de 300 pages, sans jamais lasser ni perdre le lecteur profane en droit administratif, voici la gageure que se propose de relever Bruno Latour, spécialiste de l'anthropologie du monde moderne. Contre toute attente, il y parvient parfaitement, restant, de la première à la 299ème page, aussi passionnant que le droit administratif peut paraître austère au premier abord. Se situant constamment au croisement de l'histoire, du droit, naturellement de l'ethnologie, voire même parfois de la science, Bruno Latour réussit à donner vie à son récit et nous fait "entrer" au coeur de l'activité des conseillers d'Etat, auprès desquels il a vécu deux fois six mois [...]. La clé de cette réussite réside très probablement dans le ton général de l'ouvrage - quelle idée ingénieuse, par exemple, que de présenter les délibérations sous forme de dialogues, ce qu'elles sont d'ailleurs réellement, sortant ainsi la décision juridique du carcan théorique dans lequel la jurisprudence a trop souvent tendance à l'enfermer - qui toujours didactique, ne sombre jamais ni dans la technicité excessive, ni dans la condescendance vis-à-vis du lecteur.
Nicolas Ballot / Profession politique
On n’attendait guère le sociologue Bruno Latour, professeur à l’École des Mines, à Harvard et à la London School of Economics sur le terrain du Conseil d’État. À l’origine de l’enquête, la volonté de saisir la spécificité de La fabrique du droit qui l’a amené à assister, en deux périodes de six mois à la fin des années 1990, aux travaux du Conseil. Pour la première fois sont ainsi restitués les échanges de conseillers pourtant attachés au sacro-saint secret des délibérations.
Nicolas Weill / Le Monde
Comme les meilleurs ethnologues, Bruno Latour sait restituer le vivant, la couleur, la chair du milieu étudié ("son exotisme"). Son étude très fouillée, sur un domaine particulièrement austère, capte ainsi le lecteur pour le conduire beaucoup plus loin qu'il ne pensait aller. C'est le talent des faux candides (on n'ose écrire "leur malice").
Service public
Plaisir de la découverte et de la nouveauté, de la fraîcheur et de la vivacité du regard porté, si nous osons la comparaison flatteuse pour le droit administratif, sur "cette ancienne maîtresse".
J.-M. Lhuillier / Revue de droit sanitaire et social
Si les ouvrages de pure célébration dédiées à la gloire du Conseil d'État sont légion et les introductions au droit administratif, comme le note l'auteur (p.15), en nombre significatif, les regards extérieurs sur l'institution relevant des sciences sociales sont très rares. L'ouvrage de Bruno Latour ne relève, cependant, nullement du dénigrement, ni même de l'irrévérence. Bruno Latour s'est voulu respectueux de son terrain d'investigation. Spécialiste de l'anthropologie et des sciences physiques, il a tenté de saisir l'objectivité spécifique du droit comparé aux sciences et le " passage du droit " [...]. L'exploration de Bruno Latour se révèle passionnante.
Joseph Krulick / Esprit
L'austérité apparente du titre de cet ouvrage ne doit surtout pas décourager le lecteur auquel est donné l'occasion de séjourner au cœur d'une institution qui, longtemps protégée des regards extérieurs, s'est depuis quelques années ouverte aux chercheurs et, en particulier, à Bruno Latour. [...] Livre passionnant, au style enlevé.
Françoise Dreyfus / Revue philosophique
Le droit est en principe transcendant mais n'est en fait que le fruit d'interactions de simples humains, fonde une contradiction qui est le fil conducteur du livre.
Gérald Gaillard / Sciences humaines
Il souffle dans ce livre un air frais [...]. L'auteur a su, a partir d'un objet aussi singulier et atypique, construire une philosophie du droit très consistante et très instructive.
Pierre-Yves Quiviger / Commentaire