Le concept de communication est en passe de devenir, dans nos sociétés contemporaines, le sésame capable d'ouvrir un grand nombre de portes du champ de la connaissance. [….] Après le triomphe de la " société de consommation ", nous serions entrés dans la société de " communication ", symbolisée par les expressions d'" homme interactif ", de " transparence sociale ", de " réseaux communicationnels ". Philippe Breton et Serge Proulx tentent de déceler l'origine de cette nouvelle idéologie et de comprendre les raisons de son succès. Ils en repèrent l'émergence autour des années 1940. [….] L'idée d'une réponse technique à la menace de désagrégation commence à voir le jour, sous l'impulsion de Norbert Wiener et de ses disciples notamment, conçue comme une alternative à la barbarie. Ultime recours face à l'éclatement, l'idéologie de la communication plaide en faveur d'une nouvelle société, fondée sur l'absence de rigidité, les vertus de la circulation et la transparence de l'information. C'est une idéologie sans victime, puisque l'ennemi " n'est plus un homme, mais une entité diabolique " : le déficit d'organisation. Dans ce contexte, l'analyse que proposent Philippe Breton et Serge Proulx des progrès des médias, des télécommunications et de l'électronique - tout comme celle de leurs enjeux idéologiques, économiques ou géopolitiques - prend toute sa valeur (la percée de l'ordinateur et le développement des méthodes de calcul y sont soigneusement retracés). Cette approche les conduit à dresser une sorte de cartographie des territoires de la communication et à mesurer, par exemple, l'importance croissante du phénomène publicitaire, l'influence de la télévision, les usages des médias. [….] La problématique axée autour des changements psychologiques individuels provoqués par l'action des médias a cédé la place à une interrogation sur le rôle actif du récepteur des messages et sur le poids véritable du contexte sociopolitique dans lequel s'insère la communication. Et les deux sociologues posent, pour finir, la question cruciale : " Les usages médiatiques de la société de demain pourront-ils (...) nous permettre de retrouver des possibilités accrues de création et d'autonomie ? "