Retour sur les premiers pas littéraires de l’auteur japonais Haruki Murakami, avec la réédition chez 10/18 de deux romans signés dans les années 1980 : La course au mouton sauvage et Danse, danse, danse. Le laboratoire dynamique d’une écriture unique, entre réalisme et fantaisie, critique frontale et ironie douce.
1982. En publiant son quatrième livre, un jeune auteur japonais fait sensation et s’attire les faveurs de la critique : c’est ainsi qu’Haruki Murakami, alors trentenaire, entame une brillante carrière internationale. Sous un titre plus qu’étrange, La course au mouton sauvage, Haruki Murakami impose un cocktail périlleux au narrateur dont il contait déjà les aventures dans Ecoute le chant du vent et Flipper, 1973 : un mélange détonant entre expédition picaresque et réalisme magique, peuplé d’êtres délirants, qui donne à son écriture une dimension aussi personnelle que profondément frappante.
Car si ces deux textes décrivaient déjà les errances du jeune homme devenu publicitaire, dans le Tokyo de 1978, de cette Course au mouton sauvage, la quête d’apparence absurde qui lui échoit ici le projette loin dans un univers parallèle, sur l’île d’Hokkaido… Traduite dans une trentaine de langues depuis sa parution et publiée en France en 1990, cette histoire folle peuplée d’un ancien marin tenancier d’hôtel, d’une petite amie aux oreilles magnifiques, d’une armée de fanatiques de moutons et de Sardine, un chat pétomane, n’a pas tardé à trouver son public : 100 000 exemplaires vendus dans l’Hexagone, tous formats confondus.
Une trilogie… à quatre temps !
Ce texte, initialement destiné à clore la Trilogie du Rat (qui avait poussé cet auteur fou de cinéma et de jazz à prendre la plume), connaîtra d’ailleurs, six ans plus tard, une suite inespérée, vendue encore à plus de 70 000 exemplaires en France : Danse, danse, danse, roman traduit en français en 1995, où un Haruki Murakami déjà auréolé de gloire suite à sa Ballade de l’impossible (1987) (mais pas encore pour l’époustouflant 1Q84 (2009) ni pour le virtuose Meurtre du Commandeur (2017)) offrira une dernière épopée à son narrateur : cette fois en quête de sa petite amie disparue, aux côtés d’une réceptionniste complice et d’une adolescente empathique. En arrière-plan, aussi, un écrivain réputé à l’inspiration en berne, au patronyme plus qu’évocateur, conçu comme un repoussoir symbolique pour un auteur en rapide ascension vers les sommets : Hiraku Makimura, cherchez le modèle…
On le sait désormais : au travers de ces deux textes, qui bénéficient ces jours-ci d’une nouvelle édition chez 10/18, Murakami s’amuse à osciller, comme il le fera sans cesse, entre références culturelles occidentales et profondeurs philosophiques japonaises, s’évertuant, pour le plus grand plaisir de ses fidèles, à dynamiter les codes, à offrir au capitalisme un miroir déformant, sans jamais se prendre au sérieux. Une raison supplémentaire pour partir à la découverte (ou à la redécouverte) de ce narrateur sans illusion, exalté et attachant, qui accueille les pires incongruités narratives de son éternel et jouissif « Allons donc ! ».
Découvrez des mondes inconnus, des perspectives uniques et des voyages émotionnels inoubliables alors que vous explorez les pages de ces livres qui rentreront sans encombres dans votre sac à dos.